Hilaire Arnaud, un missionnaire de Treillebois aux Antilles

Il naquit à La Foye le 11 Juin 1840 dans une famille modeste habitant Treillebois. Son grand père, Pierre Arnaud, journalier-vigneron, s’était fait surnommer « Berthelot », et tout naturellement les fils avaient hérité de ce surnom. Étonnamment Pierre écrivait son nom "ault"

           

Marié à La Foye avec Marie Cuit en 1783, ils avaient eu quatre enfants, dont le dernier Jean, dit Berthelot, qui s’était marié en 1821 au Cormenier avec Marie-Madeleine Bouinot.

 

A leur tour Jean et Marie-Madeleine eurent sept enfants, dont le dernier, Jean-Barnabé Arnaud, deviendra ecclésiastique et missionnaire.
   
Ci-dessous son acte de naissance en Mairie.

L’appel de la religion
Il sera élevé très pieusement par sa mère, Marie-Madeleine. Elle veillera à ce qu’il fasse régulièrement ses prières. Elle l’emmènera à la messe chaque dimanche à l’église de La Foye pour assister aux prêches du curé Théodore Prunier. Il sera également enfant de cœur et se sentira très tôt une vocation religieuse.

Après ses études primaires à l’école communale du village, il rejoindra le petit séminaire de Montmorillon ou il commencera ses études théologiques, puis il ira au grand séminaire de Poitiers ou il  recevra le sous-diaconat (Niveau de Diacre avant d’accéder à la Prêtrise). C’était pour lui une première étape. La promotion au sous-diaconat se faisait lors d’une cérémonie. L’on se présentait devant l’évêque revêtu d’une aube ceinte et tenant un cierge allumé à la main droite, marquant ainsi la pureté de sa vie. Les ordinands se prosternaient et se couchaient par terre. L’évêque leur donnait alors par trois fois la bénédiction.

Quelques années plus tard, le 4 Novembre 1862, il se ferait admettre au noviciat de Lyon, chez les frères prêcheurs Dominicains, au couvent du Saint-Nom, puis l’année suivante en 1863, il prononcera ses vœux.

Enfin en 1866 il effectuera sa profession solennelle à Carpentras puis sera ordonné prêtre.

Il prendra comme saint patron Saint Hilaire, premier évêque de Poitiers, c'est pourquoi, depuis cette époque il se fera appeler Hilaire Arnaud. 

 

Sa foi et son caractère à la fois volontaire et jovial fera qu’il saura se faire apprécier de tous. En 1872, il sera nommé supérieur des Dominicains de Saint-Jean de Maurienne, et pendant trois ans il s’adonnera tout entier à la prédication et conduite des âmes de la région. 

Mais cette seconde moitié du XIXème siècle sera aussi la grande époque où l’on envoyait des prêtres dans tous les pays lointains en tant que missionnaires afin d’évangéliser les autochtones. Hilaire se portera volontaire.

Hilaire Arnaud partira pour les Antilles en 1875 sur demande de l’Abbé Cudennec, vicaire général de la Martinique, celui-ci souhaitant que l’on évangélise aussi  les « petites Antilles ».

Parti de Saint-Nazaire le 7 Octobre 1875 et accompagné du père Laurent Hénocq, il arrivera à La Martinique après plusieurs semaines de navigation, au port de Saint-Pierre, puis rejoindra le quartier des Dominicains.

 
A son arrivé, comme il était bon orateur, on lui demandera de prêcher le jubilé dans l'église de Notre Dame du Bon Port, bâtie autrefois par les religieux de son Ordre. On rapporte que cette prédication du révèrent père Arnaud produisit de grands effets auprès des fidèles…
Ensuite une grande procession fut organisée jusqu’au Morne d’Orange, un pic de 361m situé au-dessus de Saint Pierre, pour y amener et ériger une grande croix commémorative.

Tous les paroissiens avaient été invités à l’évènement et étaient venus très nombreux. Il y avait plus de 5000 personnes.

Le journal des Antilles de l’époque rapporte avec emphase cet évènement : « La fête fut magnifique. Le chemin pour monter la croix au Morne d’Orange avait été décoré par les riverains.  La procession quitta l’église à 5 heures et demi du matin pour aller chercher la croix dans la savane. Celle-ci pesait près de 720kg. Elle fut portée sur les épaules par près de 250 hommes de tous rangs et de toutes couleurs, se confondant dans une même proclamation de foi…

Ils arrivèrent au sommet après une heure et demi d’efforts, puis il leur fallut ériger la croix sur son socle de pierre, ce qui fut une opération délicate et difficile.
 La foule, muette d’inquiétude et de crainte observait les moindres détails de la manœuvre. Enfin l’attente fut satisfaite. A présent la croix se dressait sur son socle, imposante dans l’espace immense.

« Oh Cruz Ave !  A l’instant les applaudissements éclatèrent, et l’air retentit des bravos et des fanfares. L’Orphéon de Sainte-Cécile mêla à l’hosanna ses notes martiales puis la musique laissa place à l’entraînant cantique « Vive Jésus, vive sa croix ». Le refrain fut répété par la multitude entière… Quel indescriptible entrain ! »


Sur l’île de Trinidad.
Après quelques semaines, en Novembre 1875, il reprit un navire pour l’île de Trinidad. Sa mission en tant que missionnaire était d’évangéliser la population et la sortir de ses superstitions.

A son arrivée il sera vicaire général de l’archidiocèse de Port d’Espagne avant d’être nommé huit mois plus tard, en Juin 1876, supérieur du couvent Dominicain, en remplacement du père Marie-Dominique Berthet, retourné en France.

Un de ses premiers actes sera de faire ériger sur la colline de Laventille une statue monumentale de la Sainte Vierge, et ce lieu deviendra un lieu de pèlerinage très fréquenté. Plus tard en 1886, une chapelle, notre Dame de Laventille, y sera construite.

Un tableau représentant la mission.

Jovial et d’un caractère doux, Hilaire était très apprécié par les habitants pour sa bonté. Il savait ne pas rendre trop austère la religion mais la rendre d’une pratique facile. Il avait toujours le mot pour rire, et était connu pour ses calembours. La population l’adopta et nombreuses furent les conversions.

Sous son ordre, la congrégation s’étendra à la paroisse de San-Fernando, puis à plusieurs autres endroits de l’île. On construira également un couvent près de la Cathédrale, et la bénédiction solennelle aura lieu le 16 février 1880.

Les tâches étaient immenses, c’est pourquoi il demandera du renfort au diocèse de Lyon pour répondre au besoin de la paroisse. Après plusieurs relances auprès du père supérieur, il finira par être exaucé.  En 1878 la congrégation de Trinidad comportera 14 membres.

La règle des Dominicains voulait que l’on change de supérieur tous les trois ans. En 1879, Hilaire sera remplacé par le révèrent père Marie-Dominique Berthet.  

Le 23 Septembre 1882, il reprendra possession de sa charge de père supérieur, et curé de la cathédrale. Après une prolongation d’un an, il y restera jusqu’en 1886.

Mi 1880, la congrégation reçut l’ordre de quitter Trinidad, ce qui créa un grand émoi pour tous les catholiques de Port-d’Espagne. Hilaire Arnaud rédigea une pétition auprès du Préfet et tous les pères Dominicains la signèrent. L’ordre de quitter l'île fut abandonné.

En 1884, il enverra le père Hyacinthe Bariou dans l’Île de Chacachacare, située entre Trinidad et le Venezuela, « pour prendre en charge cette population presque abandonnée, dans un triste état au point de vue spirituel ». 

Un presbytère et une chapelle y seront construits, puis plus tard une école.

Il semble que sur Trinidad une épidémie de fièvre jaune ait fait rage. En tout cas de nombreux missionnaires et frères Convers venus en renfort moururent quelques mois après leur arrivée, et il fallut les remplacer.La lèpre sévira aussi. 

Hilaire œuvrera pour la création d’une léproserie à Cocorite, situé au bord de la côte, au nord de Port-d’Espagne. Plusieurs sœurs dominicaines y seront envoyées pour soigner les malades.

La mission de Trinidad prendra beaucoup d'importance sous la conduite du Père Hilaire. Sur cette photo ci-dessous prise en 1887, on peut le reconnaître en haut à droite.

Toujours très actif à la tête de la congrégation, il créera en 1892 un séminaire pour former des religieuses, la congrégation de Shine. C'est ainsi qu'n an après, quatre sœurs prononçaient leurs vœux. 

Puis en 1894, il fondra la congrégation des petites sœurs de la charité, affiliée à l’ordre de Saint-Dominique, en charge de soigner les malades à domicile, Ceci sera complété l’année suivante par la construction d’un couvent.

Hasard de la politique du Vatican, en 1895, l’église décidera de remplacer dans l’île les Dominicains Français par des Dominicains Anglais. Ceux-ci arriveront peu après.

 
Hilaire restera encore deux ans, puis sera rappelé en France en 1897.
Les habitants de Trinidad le regretteront et feront plusieurs pétitions pour réclamer son retour, mais en vain.

Aux Etats-Unis
En 1898, peu après son retour en France, on lui demandera de partir pour les États-Unis, pour remplacer le père Cyprien Floriscone qui venait de périr dans le naufrage du navire « La Bourgogne ». Celui-ci était le père supérieur des Dominicains de Rosary-Hill (Colline du Rosaire), près de New-York.
 Dès son arrivée, Hilaire prendra ses nouvelles fonctions.

Là également il saura se faire apprécier et prêchera sans cesse pour propager le culte.

Fin de vie à Cuba.
Déjà soixante ans, ce qui était un âge avancé pour l’époque.  
En 1901 il reprendra le bateau pour la Havane afin de rejoindre à Cienfuégos la mission dominicaine « d’ Aguada et Yaguaramas ». 
L’ile dépendait alors la royauté Espagnole, mais était en pleine ébullition, recherchait son indépendance, et beaucoup voulaient instaurer une République. L’église catholique était très chahutée et contestée, et avait fort à faire.
Il y sera nommé le père supérieur de la mission Dominicaine. Sa mission était de « Relever la Mission de ses ruines ». 

On rapporte qu’il ne ménagera pas ses forces. Hélas, il ne pourra pas aller jusqu’au bout. Fatigue extrême ou victime des épidémies qui sévissaient dans ces îles, il décédera deux ans après, le 25 Juillet 1903.

Il s’éteindra en Saint Homme dit-on, à l’âge de 63 ans.

Avait-il envoyé des courriers à sa famille restée à Treillebois et aux alentours pendant toute cette période ? Probablement mais on n’en a pas retrouvé à ce jour.

Il est vrai que ses parents étaient morts depuis longtemps, 
 
En tout cas,  c'est un personnage de notre village au destin peu commun !

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