Gardes champêtres et cantonniers



La police rurale remonte au Moyen-Âge avec le garde champêtre ou garde messier. C'est en 1369 que le roi Charles V a créé ce corps, qui avait pour mission de surveiller les récoltes et les moissons. Sous l'Ancien Régime, les gardes sont placés sous l'autorité du seigneur de la paroisse. Celle de La Foye-Monjault a pour châtelain un dignitaire ecclésiastique de l'ordre des Bénédictins, le prieur. Ses gardes portent aussi le titre de « garde du bois de La Foye », en référence à certains terrains boisés alentour qui appartiennent au prieuré.

Il existe encore, au centre de la rue principale, un bâtiment dont une pierre porte l'inscription « Corps de Garde ». Le poste de garde était occupé par plusieurs hommes sous les ordres d'un officier.

L'inscription « Corps de Garde » est toujours visible
sur l'un des bâtiments du centre.

Voici la liste des gardes champêtres relevés dans les registres de la commune de 1684 (première mention) à 1970, date de suppression de la fonction :

SOUS L'ANCIEN RÉGIME :

XVIIe siècle, deuxième moitié :
  • Nicolas JACOB, garde du bois de La Foye (1684). Il sera ensuite notaire et procureur de la paroisse.

XVIIIe siècle, première moitié :
  • Jean BRILLOUET, sergent de la châtellenie de La Foye (1734)
  • René CROSNIER, garde de La Foye et Chizé (1720), qui sera plus tard conseiller du roi, garde des Eaux et Forêts de la maîtrise de Niort.
  • Mathurin DELAVAUD, garde la forêt de La Foye (1742, 1744), sergent et garde de la châtellenie de La Foye (1757, 1761, 1765)
  • Louis RACAPÉ, sieur de la chaussée (1720)
  • François RÉCHIN, garde de la forêt de La Foye (1723)
  • Jean RÉCHIN, garde de la forêt de La Foye (1734)

Ci-dessus, deux peintures d'Aimé Perret représentant un garde champêtre.


APRÈS LA RÉVOLUTION :
Suivant les décrets de l'Assemblée d'août 1789 et l'abolition des privilèges féodaux, la justice seigneuriale est supprimée, et le poste de garde de la châtellenie est aboli.

À sa place est créée la garde nationale de la commune, dirigée par un officier municipal. On lui adjoint au départ deux gardes champêtres (François BARREAU et Pierre BONNIN). Mais à mesure que les violences populaires s’aggravent, la troupe se renforce. En mai 1790, André Isaac BASTARD de CHATELIER est nommé commandant de la garde. On lui adjoint des huissiers afin de collecter les impôts, ainsi que quelques sous officiers encadrant une vingtaine de paysans réquisitionnés. L'un des huissiers, François DELAVAUD, est nommé capitaine.

La loi du 8 juillet 1795 (messidor an III) prise par l’Assemblée définit le statut du garde champêtre : il doit avoir au moins 25 ans, savoir lire et écrire, avoir une bonne condition physique, faire partie des vétérans nationaux ou des anciens militaires pensionnés ou munis d’un congé pour blessures. Choisi par le maire avec l’approbation du conseil municipal puis du préfet, le garde champêtre doit prêter serment devant le juge de paix du canton. Il devient un agent de la force publique par son inscription au registre de la gendarmerie. Il est assujetti au port d’un uniforme et coiffé d’un bicorne. Il doit porter une plaque de métal avec son nom, celui de la commune et les mots : « La loi ». Il est autorisé à porter toutes sortes d’armes que le préfet juge nécessaire.
XVIIIe siècle, deuxième moitié (les registres ne mentionnent pas le nom des gardes de 1750 à 1780) :
  • François BARREAU, garde champêtre (1790, 1792)
  • Thomas BILLY, ancien sergent major du régiment du Beauvaisis (57e régiment d'infanterie de ligne), garde de la châtellenie de La Foye (peut-être dès 1788 et en 1789), sergent major des gardes nationaux de la commune (1790) et garde messier (nommé le 15 août 1790).
  • Guillaume BAUDIN, garde messier (nommé en janvier 1791, par Pierre BAUDIN, son cousin germain, à cette date maire de la commune), qui avait auparavant été garde d'Ussolière.
  • Pierre BONNIN, garde champêtre (1790-1799)
  • Charles JOLLY, garde (1780)



Sous le Consulat, l'une des premières préoccupations de Bonaparte sera le sort des soldats à la retraite, ceux-ci n'ayant jusqu'alors qu'une pension insuffisante pour survivre. Le 12 septembre 1800, un arrêté déclare que les gardes champêtres seront désormais exclusivement choisis parmi les vétérans (les communes ayant à charge de les recruter). À La Foye, ce sera le cas avec Pierre BONNEAU, ancien dragon, mais seulement après la fin de l'Empire : il sera nommé en 1816. En 1822, un impôt extraordinaire de 200 francs sera voté par le conseil municipal afin de pouvoir le payer.

Le métier de garde champêtre est difficile, parfois brutal, qui rend ces fonctionnaires impopulaires auprès des villageois. En 1804, après que de nombreuses plaintes aient été émises par les habitants à l'encontre du garde Pierre GÉOFFRIAU, celui-ci sera démis de ses fonctions. 

Il reste que les excès de certains gardes, comme ici, ne peuvent être compris qu'en les replaçant dans le contexte particulièrement dangereux de leur époque. D'ailleurs, faute de volontaires, Pierre sera rétabli dans son rôle dès 1807.

En effet, sous la Révolution et le Premier Empire, il règne en France une extrême insécurité. À la crise économique héritée de l'Ancien Régime, aux disettes, au désespoir et à la pauvreté d'une grande partie de la population, qui fait de la protection du gibier et des récoltes une tâche souvent périlleuse, s'ajoutent le nombre croissant des déserteurs des guerres républicaines et impériales. Ces derniers viendront alimenter en effectif les bandes de brigands.

Joseph Fouché, chef de la police, ne s'intéressera que très peu au sort des provinces et de leurs habitants, déléguant la responsabilité des initiatives aux préfets. Ceux-ci feront ce qu'ils pourront avec leurs maigres effectifs. Mais confrontés aux défis de leur époque, ils seront souvent débordés. D'autant qu'à partir de 1808, afin de faire face aux tactiques de guérilla des populations espagnoles, Napoléon décidera d'y envoyer des forces de police, jugées plus efficaces pour la traque des brigands que l'armée régulière. Avant cela en 1806, le blocus de l'Angleterre avait vu l'essor de véritables milices de contrebandiers, souvent mieux armés que la police. Face à toutes ces menaces, les gardes champêtres se retrouveront seuls. Et beaucoup se feront tuer.

XIXe siècle, première moitié :
  • Pierre BONNEAU, devient garde champêtre après la guerre (dont il est revenu blessé), en avril 1816 (le 4, il reçoit du maire un mandat de 50 francs pour un trimestre), et au moins jusqu'en septembre 1824. Lorsqu'il prend ses fonctions, la commune n'avait pas de garde depuis quelques temps. Il sera par la suite maire-adjoint de La Foye. Dragon, il avait été fait chevalier de l'ordre royal de la légion d'honneur en mars 1814.
  • André BOYER, garde champêtre en remplacement de Pierre GÉOFFRIAU (fin 1804)
  • André BREUILLAC, garde du bois de La Foye (1830)
  • André GÉOFFRIAU, garde champêtre, fils de Pierre (1846)
  • Pierre GEOFFRIAU, garde national de la commune (1800), garde particulier (1804), garde champêtre (peut-être dès 1800, en remplacement de Pierre BONNIN, et jusqu'en 1804, démis de ces fonctions fin septembre, puis de nouveau dès 1807 et peut-être jusqu'en 1813)
  • Louis SAUVAGET, garde (1813)
  • Charles YSEUX, garde du bois de La Foye, domicilié au Cormenier (1810, 1817)

Sous l'Ancien Régime, l'entretien des routes avait été assuré par les paysans astreints à la corvée. En 1764, face à l'impopularité croissante de cette imposition, on avait créé la fonction de cantonnier. Celui-ci devait en outre entretenir les fossés et talus en bordure des routes et chemins. 

Au départ les cantonniers étaient payés à la tâche, tout comme les journaliers. Ils ne seront employés à plein temps par les communes qu'à partir de 1816. Bien que leurs fonctions soient différentes, les cantonniers seront souvent considérés par les municipalités comme de bons candidats au poste de garde champêtre. À La Foye, le premier cantonnier mentionné dans les registres est :
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Communes voisines :

XIXe siècle, deuxième moitié :
  • Louis BOYER, garde champêtre, fils d'André ci-dessus (1848 à 1859)
  • André PAPINEAU, garde champêtre (jusqu'en 1900 – il prend sa retraite à 72 ans)


Cantonniers :

XXe siècle, première moitié :
  • François DEBORDE, garde champêtre (d'octobre 1920 à juin 1939 – il prend sa retraite à 83 ans, en remplacement de Louis VIAUD)
  • Augustin DUMAINE, garde champêtre (de 1900 à 1915, en remplacement d'André PAPINEAU), né en 1865
  • Octave MIGAUD, garde champêtre (d'avril 1917 à février 1919, en remplacement de Pierre ROSSARD)
  • Alphonse NOURRISSON, garde champêtre, gendre de François DEBORDE (de juillet 1939 à février 1959 – il prend sa retraite à 83 ans, en remplacement de François DEBORDE)
  • Pierre ROSSARD, ex-maçon, garde champêtre (de 1915 à son décès en 1917, en remplacement d'Augustin DUMAINE)
  • Louis VIAUD, ex-gendarme, garde champêtre (d'avril 1919 à octobre 1920, en remplacement d'Octave MIGAUD)
Cantonniers :

XXe siècle, deuxième moitié :
  • Pierre BOYER, ex-ouvrier agricole, garde champêtre (de février 1959 à 1963, en remplacement d'Alphonse NOURRISSON)
  • Marcel BRIFFAUD, ex-cantonnier, garde champêtre (de septembre 1963 à 1970, en remplacement de Pierre BOYER. Marcel est remplacé à son poste de cantonnier par Martial RAVELEAU. En 1970, le statut de garde champêtre est aboli et Marcel sera nommé cantonnier-chef).
  • Frédéric PIED, garde champêtre (en octobre 1951, journalier nommé temporairement en remplacement d'Alphonse NOURRISSON, malade).
Cantonniers :
  • Gabriel BICHON (1908-1975 - Après-Guerre et début des années 1960), conducteur du célèbre tracteur Brutus lors des battages, avec son collègue Marcel.
  • Bruno BODIN (2000-de nos jours). Assisté de deux collègues, il a pour charge quelques 90 kilomètres de chemins ruraux de la commune.
  • Paul BONNIN (années 1970-80)
  • Marcel BRIFFAUD (Après-Guerre et début des années 1960, avec Gabriel, puis cantonnier-chef à partir de 1970)
  • Claude CACAULT (années 1970-80)
  • Léon PELLETIER (1908)
  • Marcel RAVELLEAU (années 1960-70)
  • Henri SOUCHET (années 1970)

1970 : ABOLITION DU STATUT DE GARDE CHAMPÊTRE
Dès 1958, la disparition du Code d'instruction criminelle au profit de l'actuel Code de procédure pénale fait perdre au garde champêtre sa qualité d'officier de police judiciaire. Il conserve néanmoins la majeure partie de ses compétences policières. En compensation, le maire lui confie de nombreuses missions additionnelles, telles que l’entretien du cimetière, du terrain de sport, de la station de pompage, de la salle des fêtes, de la mairie, de l’allumage des poêles des écoles, des pesées à la bascule communale… Bref, un emploi du temps bien rempli.

Jusqu’en 1958 ils sont investis d'un double mandat : 
  • Comme gardes champêtres, ils sont chargés de veiller à la conservation des propriétés rurales et des récoltes de toutes natures ;
  • Comme officiers de police judiciaire, leur principal devoir est de concourir au maintien de la sécurité publique. En cette dernière qualité, ils dépendent du procureur, sans préjudice de leur subordination au maire.
Ils sont en outre généralement commissionnés en qualité d'appariteurs ou agents de police assermentés, à l'effet de pouvoir valablement constater, par des procès-verbaux, les délits et les contraventions relatifs aux règlements de la police municipale. 


Le garde champêtre occupe dès lors une position importante dans le village, qui ne peut être confiée qu’à une personne digne de confiance. Dans un guide publié en 1863, Hallez d’Arros définie ainsi la profession :

« Un garde champêtre doit avoir une grande exactitude, une infatigable activité, une vigilance difficile à tromper, un désintéressement qui le mette au-dessus de la corruption ; il doit avoir quelques notions relatives à la police des campagnes, des idées assez nettes pour rédiger clairement un procès-verbal ; enfin assez de droiture pour que, dans l’exercice de ses fonctions, il ne se laisse influencer ni par des haines particulières, ni par des affections personnelles. » 

En janvier 1970, ce statut sera toutefois aboli et Marcel BRIFFAUD sera nommé cantonnier-chef.




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