Travaux et projets de restauration de l'église au XIXe siècle


Après la Révolution et la chute de l'Empire, la France est ruinée. Encore faut-il payer de lourdes indemnités de guerre aux autres pays et entretenir une armée d'occupation. Le pays est en proie à une crise économique qui durera encore vingt ans.

L'état de délabrement de l'église reflète les vingt-cinq années de guerres et de privations que viennent d'endurer les villageois. Déjà partiellement détruite en 1794, laissée à l'abandon pendant plus d'un an, négligée depuis lors, ce qui subsiste de l'édifice a triste mine : la toiture et les gouttières sont en mauvais état, laissant les eaux de pluie s'écouler à l'intérieur des murs et du bâtiment. Le mortier entre les pierres est à refaire. Certaines pièces de la charpente sont pourries, tout comme le plâtre des murs et les planches de couverture du plafond. Le tabernacle, percé en deux endroits, est inutilisable. Le chœur et le chevet sont a reconstruire, de même que les extrémités de la nef. Et il n'y a plus de clocher.

Tout au long du XIXe siècle, la municipalité s'efforcera d'obtenir des fonds du gouvernement, afin d'effectuer les travaux nécessaires à sa réfection. D'autant qu'avec la fin de la période révolutionnaire et le retour de la monarchie, on assiste à un renouveau du sentiment religieux dans le pays. Le prestige du pape y reste très fort.

Déjà sous Bonaparte, le concordat de 1801 avait véritablement rétabli la liberté de culte, en éliminant les restrictions de 1795 (en particulier, l'interdiction de paraître en public avec des habits ou des ornements utilisés lors des cérémonies religieuses).

Mais si le maire et le président du Conseil de fabrique obtiendront parfois l'aide de l'État, les budgets annuels disponibles seront toujours dérisoires en rapport avec les sommes nécessaires aux travaux. Il faudra lever de nouveaux impôts, tant pour La Foye-Monjault que pour le Grand-Prissé, les deux communes ayant à charge la responsabilité de l'entretien de l'église et du presbytère (les habitants du Grand-Prissé se rendant de préférence à l'église de La Foye, plutôt qu'à la chapelle en plein champ qui leur tenait lieu d'église).

D'autre part, comme on l'observera tout au long du XIXe siècle et même après, l'héritage révolutionnaire aura créé une fracture parmi les villageois, qui n'est pas sans rappeler celle qui avait auparavant opposé les protestants aux catholiques. Jusqu'aux années 60, elle opposera le camp des laïcs républicains à celui des catholiques conservateurs, les uns souhaitant la séparation de l'Église de l'État, les autres cherchant à réintroduire la pratique religieuse. Chaque camp cherchera à remodeler la société en fonction de ses valeurs, et l'avantage ira de l'un à l'autre selon les gouvernements et les municipalités en place.

Sous la Restauration

Après son coup d'état du 18 brumaire, Bonaparte avait procédé à la purge des fonctionnaires de l'État. Dans les Deux-Sèvres, les maires avaient été choisi par le préfet Dupin en fonction de leur passif révolutionnaire, permettant en 1800 la nomination de l'ancien commissaire de la République, André Augustin Vien. Quinze ans plus tard, avec le retour de la monarchie, le même procédé d'épuration se reproduit en faveur des royalistes. En juillet, le préfet Duval de Chassenon de Curzay désigne Gabriel Manceau comme nouveau maire de la commune.

Ce dernier s'empresse d'écrire au préfet en réclamant des subventions de l'État. Les réparations les plus urgentes sont réalisées en premier, en fonction des maigres budgets disponibles.

Construction du nouveau clocher
En 1817, une première allocation de l'État permet d'entreprendre quelques travaux. Un dénommé Fleury est engagé pour fournir le nouveau tabernacle avec ses gradins, qui inclut une niche pour exposer l'ostensoir. On répare tant bien que mal la toiture, mais on modifie surtout le sommet de la façade en lui adjoignant un fronton en forme de « porte cloche ». Les travaux sont achevés en 1819 sous la direction de l'architecte F. Boté, qui signe son œuvre en haut du campanile.





Le nouveau fronton de l’église est à l'image de ceux que l’on rencontre souvent en Aunis ou Saintonge, avec au sommet un campanile simple à une cloche, celui-ci étant accessible de l’intérieur par un escalier en colimaçon creusé dans l’épaisseur du mur. Les pierres de l'ancien clocher sont réemployées, donnant à la façade un aspect uniforme.

D'autres exemples de frontons avec campanile à une cloche, dans les Deux-Sèvres :

Campanile de l'église Saint-Sulpice de Tillou
Sainte-Blandine
Lagord
Les Eduts
Au dessus du portail, une fenêtre présente un arc brisé (peut être contemporaine de l'ajout du campanile). Il reste de chaque côté du portail des colonnettes qui ont été mutilées lors des restaurations successives.

Règne de Charles X

En France, l'alliance entre la monarchie et l'Église catholique génère l'opposition croissante des partis républicains. Mais pour l'heure, les conservateurs ont toujours l'avantage : en 1825, une loi punit de mort le sacrilège et la profanation religieuse.

Lors de la deuxième moitié de son mandat qui correspond au règne de Charles X, Manceau, qui est trop âgé (il meurt en 1828, âgé de 84 ans), est remplacé par son fils Hippolyte.

En 1826, ce dernier envoie une lettre au préfet faisant état des travaux qui restent à faire : réfection du bas du mur nord de l'église, en utilisant les réserves de pierre de taille de l'ancien clocher ; réparation des gouttières de couverture, remplacement des tuiles de la toiture, remplacement d'un arbalétrier pour la charpente (pièce majeure oblique supportant les pannes et les chevrons). C'est le maçon Gabriel Cubaud, demeurant au bourg, qui est choisi pour faire les travaux.

Peut être encouragé par son premier succès, Hippolyte va se lancer dans ce qui est, de loin, le projet de restauration de l'église le plus ambitieux du XIXe siècle (en fait le seul, sur plusieurs siècles, que l'on puisse dire porteur d'une véritable vision).

Projet de 1829
On ne sait quelle est la part du père ou du fils dans ce projet, peut être muri de longue date. Des dessins sont envoyés à Niort, certains portant la marque de l'architecte, d'autres plus brouillons, illustrant un plan d'agrandissement de l'église avec reconstruction du chœur et de la sacristie.

Selon ce nouveau plan, ce qui subsiste des deux travées de l'ancien chœur devra être dépavées de façon a rabaisser le niveau du sol, permettant l'élévation du nouveau chœur d'une hauteur de deux marches. L'extension de la nef et du chœur vers le fond permettra la démolition de l'actuelle sacristie, bâtiment vétuste miné par l'humidité. Deux colonnes attenantes devront également être démolies. Par économie, il est possible de conserver la charpente actuelle qu'il faudra juste étayer. Une cloison de toile tendue entre la charpente et le retable permettra de ne pas interrompre l'office durant toute la durée du chantier.

Plan montrant en coupe la nef, le nouveau chœur et la sacristie,
vue de côté. On distingue la grande fenêtre ouverte sur le mur nord du chœur. 

Vue de face (haut du dessin), avec le tabernacle à gauche, et vue de dessus
montrant l'escalier en colimaçon, en bas dans l'angle de droite, qui conduit
au campanile. Au centre, deux marches marquent l'accès à l'espace du chœur.
En son sein, celles arrondies marquent l'espace de l'autel. Sur le côté droit du mur
de fond semi-circulaire du chœur, une porte permet d'accéder à la sacristie.


Deux dessins détaillant la charpente au-dessus du chœur.
Celui du haut montre la liaison avec la charpente de la nef.


Deux vues de face du toit, en coupe. Des lignes montrent les angles définissant
le dessin des arcs de la charpente. Ces poutres pouvaient être visibles depuis
l'intérieur de la nef, ou masquées par l'apposition d'un plafond de plâtre.
Au dessus du chœur, le plafond en forme de coupole était couronné en son centre
d'un tambour circulaire laissant pénétrer la lumière.

Mais la réalisation d'un tel projet prend du temps, et le moment ne pouvait être plus mal choisi : l'année suivante, les émeutes dites des « Trois Glorieuses » balayent les forces conservatrices pro-catholiques de la Restauration, et Charles X doit fuir Paris. Sous le règne de Louis-Philippe, la religion catholique n'est plus religion d'État.

Le nouveau  « roi des Français » veut apparaître comme le représentant du peuple : il épure à son tour l'administration de tous les sympathisants légitimistes. À La Foye ce changement profite au notaire Frédéric Marchesseau, élève et gendre de l'ancien commissaire de la République. Le nouveau maire a pour adjoint Louis Augustin Rondeau, le fils du maire-adjoint des Manceau (François Augustin, qui avait auparavant servi avec Vien).

Le projet est abandonné.

S'il avait été réalisé, il aurait redonné du caractère à l'église. Hélas, faute d'obtenir le financement nécessaire, le chœur sera remplacé par un mur plein et plat fait de pierres grossières, défigurant l’ensemble de l’édifice. Une ouverture sera juste pratiquée dans le nouveau mur, donnant accès à la vieille sacristie. 

Mur du fond de l'église, construit au XIXe siècle
en remplacement du chœur et du chevet. L'emploi de pierre ordinaire
contraste avec les murs originaux en pierre de taille de la nef.

En supposant que, sous Marchesseau, la municipalité ait souhaité poursuivre le projet de restauration des Manceau, elle n'aurait probablement rien obtenu. Les années qui suivent sont chaotiques, les révoltes et les ministères se succédent les uns aux autres. Durant tout le règne de Louis-Philippe et la Seconde République, les forces républicaines laïques sont au pouvoir et la municipalité n'entreprendra plus rien.

En 1846 et 47, après une très mauvaise récolte entraînant l'augmentation des prix du blé, c'est la disette. On importe du blé de Russie, mais l'économie nationale s'effondre et la population ouvrière des villes se soulève. À La Foye, c'est une période troublée : cinq maires se succèdent en deux ans.

En février 1848, la Seconde République est proclamée et quelques mois plus tard, le notable Jean André François est nommé maire du village. Bien que son grand-père ait été officier municipal durant la Révolution, lui-même est plutôt conservateur. Il a pour adjoint Pierre Bonneau, dit Bon Jean, ancien Dragon sous Bonaparte et garde champêtre.

Avec la crise, la peur et l'instabilité engendrée par les émeutes, la population du pays a besoin d'être rassurée. À Paris tout comme à La Foye, les conservateurs reviennent au pouvoir. Le système d’enseignement est modifié pour y réintroduire la religion : en 1850, la loi Falloux oblige les instituteurs à enseigner le catéchisme et à conduire les élèves à la messe.

L'année suivante, Louis-Philippe étant déjà mort, Louis-Napoléon Bonaparte prend le pouvoir par un coup d'État. En 1852, le neveu de Napoléon Ier devient à son tour empereur.

Sous Napoléon III 

Le maire François peut alors reprendre les démarches en vu de réparer l'église. En décembre 1855, il fait voter un impôt supplémentaire de 400 francs dont les habitants de la commune devront s'acquitter. Cette somme doit permettre d'honorer une partie des dettes de la municipalité pour cette année-là, qui s'élèvent à 646 francs. On demande en vain l'aide du préfet. Par solidarité, les conseillers municipaux acceptent tous de contribuer une part plus importante d'imposition, et trois citoyens se portent volontaires pour en faire de même.

Construction de la tribune
Deux ans plus tard, François Bastard, président du Conseil de fabrique, se plaint à nouveau au préfet de la petite taille de l'église : il estime la population de la commune à 1340 habitants [14] et affirme que l'édifice ne peut accueillir qu'une fraction des villageois lors des messes ou des célébrations, que parmi eux beaucoup ne peuvent pas s'asseoir, et que la pression de la foule rend l'expérience inconfortable.

Faisant preuve de ce même sens des affaires qui avait si bien servi son grand-père, Bastard rappelle au préfet que le projet d'agrandissement proposé en 1829, faute de fonds, n'avait pu aboutir. Qu'en ces temps troublés, on ne peut demander aux habitants du village de payer pour de tels travaux sans entrainer de vives protestations, voire même des émeutes. Qu'en conséquence, il ne demande au préfet qu'un secours de 1150 francs alloués à la construction d'une tribune – proposition plus économique que celle de 1829. Située au dessus de la porte d'entrée, celle-ci sera réservée exclusivement aux hommes.
La municipalité finit par obtenir les fonds nécessaires et la tribune est érigée. Un nouvel impôt permanent de 10 centimes par habitant est par ailleurs voté (soit 100 francs ajoutés au budget annuel de la commune), qui sera toujours en place en 1877.

Intérieur du vaisseau de l'église ca 1971, avec la tribune au fond.
Et de nos jours, après sa restauration (photo Paul Pérucaud)
Un nouvel escalier en bois permet d'accéder plus facilement à la tribune. 
On distingue derrière l'escalier original en colimaçon (photo Paul Pérucaud)
Deux vues de la nef depuis la tribune (photos Paul Pérucaud)

Guerre franco-prussienne et Troisième République
Chaque année, on procède à de nouvelles réparations. Il faut aussi entretenir le cimetière et son enceinte. Mais à l'image des maigres budgets des deux communes, les travaux entrepris sont toujours insuffisants. Pour ne rien arranger, la transition du Second Empire vers la nouvelle république est une période difficile : à La Foye, de 1870 à 1877, le poste de maire change sept fois de main (Martin étant choisi à trois reprises). Quelque soit le maire, lui et le président du Conseil de fabrique réclament régulièrement des subventions au préfet, souvent sans effet.

L'entretien de l'église reste l'une des préoccupations majeures de la municipalité, d'autant que le regain de foi qu'on observe tout au long du XIXe siècle ne se dément pas. En France, la guerre de 1870-71 aboutit à une nouvelle défaite, avec son lot de mort et de souffrance. Elle vient s'ajouter à l'instabilité des régimes politiques et aux crises économiques, qui accentuent le besoin de support spirituel des familles.

En 1872, une lettre de Maxime Bastard, nouveau président de la fabrique (fils du précédent), rend compte des dégâts que la pierre de la façade de l'église a subie en raison du gèle : des ornements menacent de chuter sur les fidèles au passage du seuil. Il remarque aussi la nécessité d'ouvrir une deuxième fenêtre, l'église étant devenue trop sombre depuis la construction de la tribune. Pour cela, il faudra fait appel à des ouvriers spécialisés afin de pratiquer une ouverture dans un mur porteur d'1.45 mètres d'épaisseur. Par surcroit, l'édifice est mal aéré, si bien que des gens souffrent parfois de malaise lorsque la foule se presse. Quant au plafond, alors en tillis, c'est-à-dire composé de fines planches de bois, il est pourri et menace de s'effondrer. Son remplacement par un plafond de plâtre, juge-t-on, rendra l'édifice plus clair. Il permettra aussi d'améliorer la qualité de l'air et la sonorité.

Bastard affirme dans cette lettre que l'église n'a pas reçu la moindre subvention de l'État depuis 1789, ce qui impliquerait (si c'est bien vrai), que toutes les réparations entreprises jusqu'alors avaient été payées, soit par les communes de La Foye et du Grand-Prissé, ou sinon par les dons de particuliers. Si l'abandon du projet d'agrandissement de 1829 conforte son argument, qu'en est-il de l'ajout du clocher en 1819, de la reconstruction de la sacristie en 1825, des travaux de réparation de 1827 et de l'addition de la tribune en 1857, dont le coût dépasse de loin la portée des budgets municipaux ?

Le maire doit aussi prendre en compte d'autres nécessités : le presbytère étant depuis longtemps vétuste et inadéquat pour les élèves, il est grand besoin de construire une école. On considère par ailleurs l'achat d'une pompe, l'approvisionnement en eau potable étant toujours aussi problématique.

Le porche (photo Paul Pérucaud)

En 1873, un fond de secours de 200 francs est alloué à la commune. La façade de l'église est refaite mais avec un porche de mauvaise facture, et on opère de même quelques réparations au plafond.

L'affaire du noyer
En 1877 le maire de La Foye fraîchement élu, Louis François Martin, rédige une nouvelle liste des réparations indispensables à l'entretien de l'église et du presbytère. Les travaux doivent être réalisés par Jean Burgaud, entrepreneur au village, et le devis se monte à 1120 francs. La municipalité et la fabrique, qui ne disposent que d'un budget de 300 francs, réclament un secours de 650 francs.

Mais les deux communes se querellent : tout commence avec une plainte de Martin adressée au préfet. Il exige de la commune du Grand-Prissé qu'elle s'acquitte de sa part du budget d'entretien. Le maire du Grand-Prissé est pourtant Maxime Bastard, président du Conseil de fabrique... Répondant directement au préfet, ce dernier s'explique : il ne paiera rien à la « caisse commune des intérêts spirituels » tant que le profit de 120 francs, tiré de la vente du bois d'un noyer appartenant au jardin du presbytère, n'aura pas été reversé à la caisse. Selon lui, la municipalité de La Foye a abattu et vendu l'arbre à son seul profit. Il rejoint malgré tout Martin quant au secours sollicité.

Aucun d'eux ne prête attention aux tâches jaunes qui apparaissent l'année suivante, dans les vignes de Jacques Arnaud Brigadier, dit Jacquet l'ami, au fief de la Brousse.

L'affaire Grellier
En 1879, on décide de refaire une partie du dallage de l'église qui en a bien besoin, certaines dalles étant brisées, d'autres enfoncées. La municipalité loue à cette fin les services de Pierre Louis Grellier, maître maçon à La Foye. Au cours des travaux, on se rend compte que l'estimation de la surface à refaire a été légèrement sous-estimée. Heureusement, une réserve de pavés permet d'y pallier. Mais le projet complété, Grellier envoie sa facture et le montant du devis initial à plus que doublé ! Martin tente de raisonner avec le maçon, mais ce dernier rejette toute négociation. La commune en réfère au préfet et refuse de payer, forçant Grellier à engager des poursuites judiciaires...

Cette année-là en février, Jules Ferry devient ministre de l’Instruction publique. Avocat de la laïcisation, il va profondément réformer l'école. Les instituteurs qu'il va former, les fameux « hussards noirs de la République », vont éduquer les enfants des campagnes et propager les idées républicaines. L'une de leurs mission est la laïcisation de la société.

L'année suivante, sur un décret de Ferry, les jésuites sont une nouvelle fois expulsés de France. Avec eux, les bénédictins, les capucins, les carmes, et les franciscains. 261 couvents sont fermés, 5 643 religieux sont expulsés.

Tout ce temps, au village, la cloche installée avec le campanile il y a plus de 60 ans avait continué de rythmer les jours, annonçant les heures, les messes, les baptêmes, les enterrements, les mariages et les jours de fête. Mais alors que les paysans prennent conscience de la gravité de la maladie qui se répand parmi leurs vignes, et comme si elle venait de sonner le glas d'une époque, le silence se fait : la cloche vient de se briser...

La nouvelle cloche de l'église de la Foye, baptisée par
Marie-Thérèse Bastard de Péré lors de son inauguration
en 1886, toujours en place aujourd'hui.


Achat de la nouvelle cloche
Dès 1885, dans toute la région, le vignoble est ruiné. Une lettre de Martin au préfet parle des dégâts causés par le phylloxéra comme d'un fléau, qui a plongé la plus grande partie de la population du village dans la misère. Au point qu'il demande une subvention capable de soulager, durant l'hiver, les plus nécessiteux. Impossible dès lors, écrit-il au préfet, d'entreprendre quoi que ce soit, ce qui comprend l'aménagement d'un nouveau chemin vicinal demandé par la préfecture.

Pourtant, il faut bien trouver les moyens de remplacer la cloche, alors essentielle à la vie commune. On estime que la nouvelle devra peser 250 kg (plus lourde et de meilleure qualité que la précédente) et coutera 600 francs. Avec l'aide de la préfecture qui contribue 200 francs, la commande est faite cette année-là à Émile Vauthier, fondeur de cloches à Saint-Émilion, en Gironde. Malgré les circonstances, La Foye et le Grand-Prissé parviennent à réunir une avance de 150 francs. La différence, soit un prêt de 250 francs à 5%, devra être repayée sur deux ans.

La nouvelle cloche est garantie de première qualité par le fondeur. Faite d'un alliage composé à 78% de cuivre rouge et 22% d'étain, elle possède une belle harmonie sonore. Vauthier s'engage à fournir les accessoires (composés d'un bâton en fer forgé avec courroie, bride et boulons, un mouton en bois d'ormeau, des ferrures, des coussinets en bronze avec boite à huile, une demi-roue et des ferrures de suspension). L'ensemble est garanti pour cinq ans.

Ce dernier est également responsable de l'installation, qui a lieu en septembre 1886. À cette occasion, il démonte l'ancienne cloche qu'il rachète à la municipalité, ce qui permet de couvrir les frais de voyage d'un ouvrier spécialisé et l'échafaudage. La nouvelle cloche est baptisée « Marie-Thérèse », en l’honneur de Marie-Thérèse Bastard de Péré, sa marraine lors de l’inauguration.

Dissolution de la commune du Grand-Prissé
En 1887, on décide avec l'accord du préfet de supprimer la commune du Grand-Prissé. Celle-ci possédait une partie des hameaux du Grand-Bois et du Puyroux. La dissolution permet à La Foye d'acquérir ces deux hameaux dans leur totalité. La commune hérite en même temps de deux ou trois cent habitants qui viennent grossir les rangs des fidèles à la messe. Cent francs sont alloués pour la correction des pièces cadastrales.

C'est aussi le début d'une nouvelle époque : le paysage se transforme, les vignes disparaissent. Elles laissent place à l'élevage et à la culture céréalière. La grande sécheresse de 1893 voit l'exode rurale des vieilles familles de la région qui émigrent vers la ville de Niort. Elles sont remplacées par des éleveurs venus de Vendée.

Alors que dans cette partie des Deux-Sèvres, la campagne de laïcisation du gouvernement avait commencé a porter ses fruits, l'arrivée des Vendéens va renverser cette tendance. Fervents catholiques et pratiquants, leurs familles nombreuses viennent à nouveau remplir l'église.

Le dimanche à la messe, les hommes se tiennent à l’étage, sur la tribune construite quarante ans plus tôt, et les femmes et les enfants sont assis en bas dans la nef. On y chante des cantiques pendant l’office et, à la sortie, tout le monde se retrouve pour papoter sur le parvis, ou dans l’allée de tilleuls. Les hommes ont mis leur costume et les femmes paradent dans leur plus belle toilette. À cette époque tout le monde porte un chapeau, et les femmes parfois un fichu sur la tête. Pendant ce temps, les anticléricaux, redevenus minoritaires au village, attendent leurs femmes au bistrot.

Reconstruction de la sacristie
En 1895, on décide enfin de reconstruire la sacristie. Ce bâtiment insalubre n'a jamais fait l'affaire : situé en contrebas du terrain environnant et privée d'aération, il y règne une humidité permanente qui détériore les objets du culte, au point de devoir les remplacer tous les six mois. On fait d'abord appel à Jean Burgaud pour la reconstruction, estimée à 880 francs, mais c'est finalement Louis Chagnaud, d'Usseau, qui sera choisi. Par économie, on réutilisera les matériaux composant l'ancienne sacristie. Comme toujours, la municipalité et la fabrique sont obligés de solliciter une aide extérieure : ils ne disposent que de 100 francs. Le curé Jeaudeau juge ces travaux tellement urgents qu'il y contribue personnellement 280 francs, le restant étant couvert par la préfecture. Le propriétaire du terrain voisin, Florentin Champagnard, accepte d'en céder une partie au profit de la nouvelle sacristie. Celle-ci sera finalement terminée en 1897.

Entretemps, l'église a bénéficié d'important travaux de restauration, pour un total de 835 francs, effectués par le même Chagnaud : démontage et réparation de la charpente avec fourniture d'une croisée, restauration des murs et des fondations, addition d'une porte, apposition d'un nouveau plafond de plâtre et crépissage de l'intérieur.


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