Souvenir de loups


Au Leu ! Au Leu !

Cette peur ancestrale du loup vient du fond des âges. 
 
La présence des loups, associée depuis des siècles aux contes populaires qui peuplaient les nuits d'êtres surnaturels, de revenants et de garous, créatures du diable, inspirait la peur dans les chaumières.
 
L'hiver, à la nuit tombée, les paysans réfugiés auprès du feu, entendaient parfois leurs appels mêlés au vent. 
Dans le village l’inquiétude régnait. On ne laissait pas les enfants sortir seuls le soir, et les jeunes bergers et bergères étaient souvent accompagnés de chiens de garde.
Le soir on enfermait les troupeaux et lorsqu'ils allaient en forêt ou dans les bois, les bûcherons ne partaient pas sans leur "fourche à loup", une mauvaise rencontre étant toujours possible.
 
Cette période n'est pas si lointaine, à peine un siècle, et les anciens au village se remémorent ces histoires que leur racontaient leurs parents. Réalité ou légende, elles servaient à assagir les plus turbulents.
 
Les loups à La Foye
De tous temps, l’immense forêt de la Sylve d’Argenson qui englobait à la fois la forêt de Benon et celle de Chizé, leur avait servi de refuge. La nourriture y était abondante : en plus des chevreuils et des sangliers, les loups avaient une prédilection pour les moutons qu'ils surprenaient aux abords de la forêt. Plus tard après la grande déforestation, des loups, parfois en bandes, avaient pris l’habitude de se déplacer entre ces deux forêts en passant par La Foye. Jusqu’à l’époque du phylloxéra, des troupeaux de moutons et de chèvres se déplaçaient entre les vignes, constituant des proies faciles, surtout la nuit,

Même si les archives ne rapportent pas d’attaque de loups sur la commune, leur présence est avérée dans la région jusqu'à la guerre de 14. Les anciens en parlaient régulièrement. Les chasseurs et paysans disaient régulièrement en avoir vu, et de temps à autres les journaux relataient des attaques de troupeaux mais aussi de bergers, que ce soit du côté de Melle ou plus au nord, en Gâtine, ainsi que dans le Marais Poitevin.

Certains lieux-dits de la commune de La Foye ont gardé le souvenir de la présence du loup : On relève sur les cartes le « chemin de la Louve », qui longe le bois de la Chênaie-Bossète, en direction du bois de La Foye, la « Fosse aux Loups », un lieu situé au nord du hameau du Grand Bois, et aussi le « Creux de Loup » au nord de Limouillas, à l'embranchement du chemin de la Revêtizon, petite dépression en contrebas d'un ruisseau où, selon les anciens du hameau, les loups venaient boire...

Lieu-dit du « Creux de Loup »
 
La chasse aux Loups
Sous l'ancien régime, au nom du respect du droit seigneurial de chasse, cette activité était interdite aux manants, y compris pour les loups. Et on peut penser que les seigneurs, détenteurs de ce droit exclusif, couraient des gibiers plus intéressants. 
A la veille de la Révolution, on en était toujours à ce stade de la réglementation, cependant les attaques de troupeaux étant de plus en plus fréquentes avaient poussé à la nomination de chasseurs de loups dans les communes concernées, sous la responsabilité des lieutenant de Louveterie, seuls habilités a organiser des battues. Mais ces chasseurs n'avaient pas le droit de posséder d'armes à feu.
 
Ceci avait été reconfirmé quelques années auparavant par Louis XVI à Versailles.

Arrêt du Conseil portant règlement pour les chasses aux loups… Versailles, 15 janvier 1785
Le roi s’étant fait représenter en son conseil les édits, ordonnances et règlements concernant les chasses aux loups et autres bêtes nuisibles ; les dites lois en date des mois de janvier 1583, 1587, et 1600 ; juin 1601, juillet 1607 et août 1669 ; et les arrêts du conseil des 3 juin 1671 et 16 janvier 1677 ; les provisions du grand louvetier du 20 octobre 1602 et 9 décembre 1681 ; les arrêts du conseil des 26 février 1697, 14 janvier 1698, et, notamment, celui du 28 février 1773 : et S.M. étant informée que nonobstant ces règlements, il s’est encore élevé des difficultés et des conflits entre les sieurs grands maîtres et officiers des eaux et forêts, le grand louvetier et officiers de la louveterie, et les sieurs intendants et commissaires départis. Et S.M. désirant prévenir ces difficultés et fixer invariablement les formes les plus convenables, pour qu’à l’avenir les huées et battues, pour la destruction de ces animaux, soient faites de la manière la plus prompte, elle a résolu de faire connaître ses intentions à ce sujet : ouï le rapport etc
Art 1. Maintient S.M. son grand louvetier dans le droit et faculté de chasser et faire chasser aux loups, louves, blaireaux et autres bêtes nuisibles, par lui, ses lieutenants, sergents louvetiers, et autres qu’il pourra commettre à cor et à cri, force de chiens, et avec toutes sortes d’armes, bâtons et pièges, filets et engins, tant dedans que dehors les bois, buissons, forêts, en quelque lieu que ce soit du royaume, soit dans les terres et domaines appartenant à S.M., soit dans celles appartenant aux ecclésiastiques, seigneurs et communautés.
Art 2. Fait S.M., défenses à toutes autres personnes de quelque état et condition qu’elles soient, de chasser aux loups, louves, blaireaux et autres bêtes nuisibles, à l’exception des seigneurs haut justiciers, dans l’étendue de leurs terres, fiefs et seigneuries, sous peine de perdre leur fusil, filets et engins et de 500 livres d’amende.
Art 3. Ordonne S.M. que les dits lieutenants, sergents louvetiers, et autres que le grand louvetier jugera à propos de commettre, seront tenus de faire présenter leurs provisions ou commissions au greffe de la maîtrise des lieux pour lesquels ils auront été commis, pour y être enregistrées sans frais, sur l’attache du grand maître, sans que desdits enregistrement et attache on puisse induire que les officiers de la louveterie soient subordonnés à la juridiction des maîtrises, pour l’exercice de leurs fonctions
Art 4. Seront les lieutenants, officiers, sergents et gardes de la louveterie, tenus de faire autant de huées et battues pour la chasse aux loups, qu’il sera jugé nécessaire, lesquelles huées et battues ne pourront être faites qu’il n’y ait à la tête un ou plusieurs officiers de la louveterie.

(Source : Législation de la chasse et de la louveterie - Charles Berriat-Saint-Prix - Paris - 1845)

La révolution verra la libéralisation du droit de chasse et la création du permis de port d'arme, ce qui démocratisera  l'usage du fusil.  Désormais, tout le monde pouvant chasser le loup !
C'est aussi à cette époque qu’apparaîtra le fusil à deux coups, puis à partir de 1840, le fusil à percussion, beaucoup plus puissant et rapide.
 
Des chasseurs de Loups à La Foye et aux environs
Apparemment, les menaces sur les troupeaux étaient suffisamment fréquentes sur la commune de La Foye et les environs pour que des chasseurs de loups y soient agréés.  Dans les archives on relève en 1783 et 1785 les noms de Jean Burgaud et Jean Thalon.
Et pour les paroisses voisines : François Pivaut et François Baronnet à La Charrière en 1775 et 1787, François Jolly en 1787 à Usseau, Jacques Benoist, Pierre Faucher, Jean Miraudeau et Michel Ré à Marigny entre 1777 et 1787, et Pierre Dubois aux Fosses en 1775 (Cf. au relevé de Gloria Godard, La destruction des loups dans la généralité de Poitiers, de 1751 à 1787).
 
Les loups, furent abondants en Deux-Sèvres.
Autrefois, les forêts du Poitou et de Saintonge retentissaient du hurlement des loups gris. Il s'en trouva jusque vers la fin du XIXe siècle dans le bois de La Foye, jouxtant la forêt de Chizé, et leur population augmenta durant les famines et les guerres de l'époque révolutionnaire.

Dans les provinces, louvetiers et administrateurs des Eaux et Forêts intervenaient, souvent en se concurrençant. On sollicitait les nobles et la population pour les battues, généralement plutôt inefficaces, et pour la traque. La lutte contre les fauves devient un impératif.
 
Régulièrement, des ordonnances étaient prononcées pour organiser ces battues.
 
Le 24 mars 1730, l’administration des Eaux et Forêts informe qu’en différents endroits du Poitou « il s’est répandu une grande quantité de loups qui ont égorgé plusieurs hommes et causent actuellement une entière destruction de bestiaux. Ordonnons qu’il sera fait des huées (battues avec cris) et chasses aux loups. Enjoignons à tous les habitants des lieux où seront faites les huées et chasses de se trouver munis d’armes convenables... » 

On remarque la pique à loup, à deux pointes,
brandie par le paysan à  droite et le noble avec son fusil.

Elles auront bien sûr une certaine efficacité, et les autorités informeront régulièrement sur le nombre de loups tués afin de rassurer la population.

Les annales du Poitou précisent qu’entre 1770 et 1784, 5247 loups et louveteaux y ont été tués. 
Entre 1798 et 1812, 125 louves, dont quatorze pleines, 172 loups et 360 louveteaux l’ont été en Charente. 
De 1770 à 1788, dans le Bocage Bressuirais en Deux-Sèvres, ce sont 64 loups et 134 louveteaux. 

De 1795 à 1805 : d'après Henri Gelin, en dix ans, 788 loups (y compris louves et louveteaux) ont été tués dans les Deux-Sèvres et 11170 francs de primes ont été versés entre 1795 et 1799. La récompense était toujours plus forte pour les louves et plus encore pour celles qui étaient pleines.

Mais c'est surtout à partir de la Révolution, en l'an VI (1797-1798), que la destruction des loups se poursuivra d'une façon méthodique et générale. La loi du 10 messidor an V établira une prime particulièrement attractive par animal abattu. : 10 livres pour un loup et 2 pour un louveteau.

En 1801 sous l’Empire, le Baron Dupin, préfet des Deux-Sèvres, écritqu’en conséquence des Guerres de Vendée, les loups s’étaient multipliés dans le département. Il ajoutera que, dans un pays où pendant l’hiver qui est la saison de l’étude, les chemins sont impraticables, les loups y font de grands ravages. Dès lors, quelle est la mère qui voudra envoyer ses enfants à une école distante de deux lieues ? 

En août 1816, sous la Restauration, le préfet de la Vienne écrit aux maires du département dans une circulaire : « les loups se multiplient d’une manière si effrayante, que ces animaux féroces ne trouvant pas de quoi satisfaire leur faim attaquent les hommes, un enfant en a été victime. Je viens d’inviter MM. Les Lieutenants de Louveterie de diriger différentes battues... »
 
Les attaques de troupeaux se font plus fréquentes, surtout  en Gâtine, ce qui poussera le préfet des Deux-Sèvres  a ordonner une battue, sous la direction du Lieutenant de Louveterie de l'arrondissement. 
 

Collection. Raphaël Soupiot


Malgré ces mesures, la présence des loups rezstera importante dans notre région. 
En 1838, un écrit précise que le grand problème de la forêt de Benon, c’est la prolifération des loups. Et en 1844, le naturaliste de Lastic-Saint-Jal dans sa Zoologie du département des Deux-Sèvres, localise de nombreux fauves dans les bois et forêts – spécialement celles de Chef-Boutonne, Chizé et Aulnay. 


Régulièrement des journaux font état de méfaits des loups sur le bétail. En novembre 1851, la Revue de l’Ouest parle de leur présence dans le Marais Poitevin : « Les loups dont nous avons signalé les ravages dans le marais de Benet ont été chassés de ces communes et se sont jetés dans le marais d’Irleau et du Vanneau. Dans la nuit du vendredi à samedi ils ont dévoré six chèvres... Des vaches les ont fait fuir. Il serait à désirer que des battues fussent faites dans ces contrées afin de donner quelque sécurité aux habitants qui n’osent plus conduire leurs bestiaux dans les pâturages... » 

Plus tard en 1871 et 1875, des habitants affirmeront en avoir vu près de Prin-Deyrançon, à côté de Mauzé. Mais malgré les chasses et battues, leur nombre ne diminuera que très progressivement. 

Henri Gelin dans son livre De la destruction des loups dans les Deux-Sèvres, édité en 1905, précise que même si les loups ont disparu de Charente-Maritime et de Vendée, ils sont encore présents dans la Vienne, en Charente et dans les Deux-Sèvres. Et pour ce département, il signale que de treize loups tués en 1894, on passe de un en 1901 à aucun de 1902 à 1905. 

Cependant, en 1914 on constate toujours le passage de loups en forêt de Chizé. Et plus tard, dans les années 1920-1930, des observations assez sûres et des cadavres témoignent qu’il y en a encore dans les départements des Charente, de la Vienne mais également dans les Deux-Sèvres. 

En 1920, la municipalité de La Foye décrète une campagne d’abattage de chiens enragés qui sévissent sur la commune, peut-être suite à la morsure d'un loup...


Circulaire du maire François Arnaud, datant de 1920, 
instruisant le garde champêtre de la commune 
de veiller à ce qu'aucun chien ne soit laissé en libre circulation.

Craintes en forêt de Chizé
Les trois frères Vinatier qui avaient passé leur jeunesse aux Fosses avant d’habiter La Foye, racontaient que l’hiver, lorsqu'ils allaient couper du bois en forêt de Chizé, ils craignaient d’y rencontrer des loups... Ils avaient conservé de cette époque des « fourches à loups » qu’ils montraient parfois aux intéressés, et qui les avaient autrefois aidé à se défendre.





 
Craintes en forêt de Benon
En Mars 1809, le maire de Courdault, près de Mauzé, envoie un courrier au préfet.
"Un très grand nombre de loups dans cette contrée se multiplient d'une manière effroyable; ils ne sont pas craintifs et sortent du bois avec audace. Ils marchent en troupeaux de 10 ou 5 et abordent sans timidité les troupeaux
Les cris du berger, l’aboiement des chiens, qui se contente d'aboyer, le poil hérissé sous l'effet de la peur, ne leur font pas lâcher leur proie. Ils enlèvent journellement des brebis en grand nombre, et presque à la porte des métairies. Ils ont enfoncé il y a quelques jours la porte d'une bergerie ou ils ont étranglé 35 ou 37 brebis. Enfin c'est à un tel point que les paysans n'osent plus sortir leurs troupeaux. 
Il n'y a aucun chasseur sur cette commune et les loups n'entendent jamais de coups de fusil, ils n'ont pas peur !
Je vous demande d'organiser une battue au plus vite...
                                                                                                                                    Signé: Quinsac

Quelques années plus tard, en 1816, c'est le maire de Saint-Georges-du-Bois qui écrit :
"Les habitants de ma commune sont dans la plus grande désolation par la grande quantité de brebis que les loups ont mangé journellement. Ces animaux sont en si grand nombre qu'ils vont par trois, quatre ensemble, on a même suivant une louve en furie jusqu'à neuf.
Le seul moyen serait de de se réunir à plusieurs communes et faire une battue.
 
Les derniers Loups en Deux-Sèvres
Du XIXe aux premières décennies du XXe siècle : tous les moyens vont être bons : pièges, fosses, captures des louveteaux, poison comme la noix vomique et surtout la strychnine qui va faire des ravages dès les années 1880, tirs au fusil, chasses des lieutenants de louveterie et des veneurs.

De 1894 à 1905 : Henri Gelin signale que de 13 loups tués en Deux-Sèvres en 1894, on passe à un en 1901 puis à aucun de 1902 à 1905.

En 1921 un chasseur et son cousin, lieutenant de Louveterie témoignent que près de La Chapelle-Bertrand, ils ont observé un vieux loup, dont ils estiment l’âge à dix ans. Ils disent avoir eu le temps de bien le voir car il ne s’est pas enfui tout de suite. Il n'est parti qu'après avoir hurlé en direction des bois de La Ferrière. Les chasseurs se demandent d’où il peut bien provenir car pour eux les loups ont disparu dans le département avant la Première Guerre mondiale.

Enfin, en Novembre 1927, trois louvards venant de la Vienne apparaitront dans les bois de L’Hermitain près de Saint-Maixent. (Louvard,= Jeune loup adolescent ayant passé le stade de louveteau, mais pas encore adulte).

Sur la commune d’Aigonnay, Félix Morin en tuera un qui venait d’attaquer une chèvre le 6 Décembre 1927, ce qui occasionnera un article dans le Mémorial des Deux-Sèvres du 18 décembre 1981. 
Ce sera sans doute le dernier tué dans ce département.


Histoires d'attaques de Loups dans notre région
Un certain nombre d'auteurs, et la presse locale ont documenté ces rencontres avec des loups dans notre région, avec parfois des attaques et blessures mais aussi des morts. 
 
 
 
A Vanzay (près de Melle) le 20/2/1725  :
« Le vingtième jour de février 1725 a été inhumée dans le cimetière Saint-Jacques de Vanzay par moi prêtre curé soussigné Jeanne Beguin, épouse en son vivant de feu Isaac Gadiou, âgée de soixante ans ou environ, morte par un accident épouvantable ayant été dévorée par un loup dans le bois de Sanxay le 19 du même mois et an que dessus. Inhumée en présence de Jean et Jeanne Gadiou, ses fils et fille, Pierre Denoit, Antoine Girardin et qui ne savent signer.
                                                                                                    J. Lairain, prêtre curé de  Vanzay
A Chiché (près de Parthenay) le 4/3/1736 
 "Aujourd’hui quatrième du mois de mars mille sept cent trente-six, je, curé de Chiché soussigné, ai été averti que dans la futaie des bois de Berthuis, en la susdite paroisse de Chiché, on avait trouvé un homme mort exposé à la proie des loups et autres bêtes féroces, lequel ayant été reconnu, on m’a dit que son nom était René Druault, de cette susdite paroisse, âgé environ de dix-sept ou dix-huit ans, bon catholique. Et pour prévenir la voracité de ces susdites bêtes, et autres incongruité, j’ai été conseillé d’aller bénir le corps de cet homme mort, et m’y suis transporté ce dit jour sur les dix heures du matin, assisté de messire Jean Chevalier, prêtre mon vicaire, de François Rochard, sacristain, de Louis Estavard, marchand, de Mathurin Rebillard, aussi marchand, de Jean Druault, laboureur, de Aubrand, marchand, de Jolly, journalier, de Aumont, laboureur, et de plusieurs autres, qui ont déclaré ne savoir signer de ce enquis suivant l’ordonnance tous les soussignés et ai conduit le susdit corps assisté des susdits témoins jusqu’à notre église pour y rester sans sépulture pendant le temps prescrit par l’ordonnance, à Chiché, le jour et an que dessus et a été inhumé le 6 dudit mois sur les cinq heures du soir après avoir été visité par messieurs Clinget de la baronnie de Bressuire"
                                                                Chevalier, prêtre vicaire de Chiché, Touraine, curé de Chiché

Aux Alleux (près de Melle)  Mai 1766
Un loup enragé tue 5 personnes.
(Raymond Deborde. Genea79)
 
"L'an de grâce mil sept cent soixante six, le dix mai, Jean-Pierre Gurgand, âgé de cinquante cinq ans environ, est décédé dans sa maison situé au hameau de la Borie en cette paroisse, sa mort causée par la morsure d'un loup enragé, et s'est confessé à moi, soussigné avec toute la connaissance et les sentiments d'un bon chrétien. Mais les transports et les convulsions de cette étrange maladie, ne luy ont pas permis de recevoir les autres sacrements. Il a été enterré le lendemain de son décès le onzième jour des mois en an que dessus.

"le même jour que dessus, et de la même maladie causée par la morsure du même loup enragé, est décédé Marie-Anne Gurgand âgée de six ans, fille d'André Gurgand et de Marie-Anne Mandegault, du hameau de la petite Tranchée en cette paroisse, a été enterrée dans le cimetière au lieu accoutumé de la sépulture des enfants.
 
"L'onze du même mois de Mai, Marie-Anne Madegault, épouse d'André Gurgand, âgée de vingt-sept ans, aussi mordue par le même loup enragé, est décédée dans sa maison située au hameau de la Tranchée,  avec les sentiments de la plus vive piété, elle s'est confessée plusieurs fois lors de sa maladie, mais ses profondes blessures au visage et autres parties de son corps, et la violence de ses accès, ne luy ont pas permis de recevoir les autres sacrements..."
 
"Le quatorze du même mois, ce sera Françoise Menuet, âgée de dix-huit ans, également mordue et atteinte de la même maladie, qui décédera dans la maison de Jean Chaignepin située au hameau de la Caussardière, en cette paroisse ou elle demeurait en tant que domestique..."
 
Enfin, le vingt-trois mai, Louis Thebault âgé de quinze ans, attaqué de la même maladie causée par la morsure du même loup enragé, est décédé dans la maison de ses parents situé au hameau de la Gaillochaumière en cette paroisse...Il s'est confessé à moi...
                                                                                  C.F. Maichin, prieur curé des Alleuds"
 
A Étusson  (à coté de Bressuire) le 23/7/1771 
 « Le 23 juillet 1771, Mathurin Fuseau, bordier à La Charbonnière, maître et curateur à personne et biens de Pierre Menard, âgé d’environ 12 ans, fils de défunts Jean Menard et de Perrine Clemenceau, nous est venu avertir que ce matin il avait trouvé dans le champ nommé La Tremblais de cette paroisse, le corps dudit Pierre Menard démembré, déchiré et dévoré par la voracité des loups ou autres bêtes féroces. Lequel, en ayant recueilli avec toute l’exactitude possible le reste de ses ossements, il nous les a porté à inhumer dans le cimetière de ce lieu, ce que nous avons fait en présence desdit Mathurin Fuseau et Mathurin Milliasseau qui ne signent.
                                                                                            Champion, vicaire
 
A Aubigné (à coté de Brioux) le 23/1/1774 
 « Le 23 janvier 1774 a été inhumé, dans le cimetière de cette paroisse, le corps de Jean Verneuil, laboureur, âgé de 35 ans, étant mort d’une maladie violente, occasionnée par la rage qui lui a été communiquée par un loup enragé, par lequel il a été dévoré, le 10 du mois de décembre dernier. Ont assistés à ces funérailles messire Jean Jamain, vicaire de cette paroisse, Simon Merlan, sacristain, Jean Couchier, Jacques Demerlier qui ont déclarés ne savoir signer, excepté les soussignés.
                                                                                     A.     J. Lizabois, prêtre et curé d’Aubigné
 
A Maisontiers (à coté de Parthenay) le 13 Avril 1843
" Un loup énorme sortant des brandes de maisontiers, a attaqué hommes et bestiaux le 27 Mars. Poursuivi, il blesse plusieurs personnes et parcourt les communes de Boismé, Amailloux et Adilly, ou il est cerné. Pierre Guilbaud, domestique de Mme de Brossard, lui tire un coup de fusil en plein corps : Il se relève et est finalement achevé par un gendarme de Parthenay qui lui tire aussi dessus et enfonce une baïonette dans sa gueule.  Il a mordu soixante bestiaux mais après expertise par un médecin il s'avère qu'il n'avait pas la rage. Guilbaud et le gendarme reçoivent chacun une prime  de 50 francs"
                                                                                                Le moniteur universel.
 
A Beurlay et Le Gua (à coté de Surgères) en Octobre 1822
Un loup atteint de la rage attaquait des troupeaux, puis tuait dix personnes et en blessait autant. 
 
"Le 12 octobre, sur les trois heures, un loup enragé ravagea sur la commune de Saint-Thomas un troupeau de brebis.
Sur les quatre heures, il attaqua les nommés Boutain et Bonniot, armés d’outils aratoires ; le combat fut le long, mais les braves se défendirent courageusement et Bonniot seul fut mordu au bras.
Sur les cinq heures, il se jeta sur les filles Aimard. La plus jeune, saisie au col par le loup, a été traînée ainsi plus de 30 pas. Le père qui travaillait auprès court à leur secours, tous trois sont dangereusement blessés.
De là l’animal féroce se porte à la Marboire, petite lieue de distance, commune de Saint-Sulpice., dévore chiens et brebis. Les filles Combaud, bergères, veulent défendre leurs troupeaux ; à l’instant le loup les attaque ; un enfant de huit ans, leur frère, court au secours, prend le loup par la patte. Le père Combaud vole également au secours de ses trois enfants ; enfin Georget, ancien militaire, s’arme d’un levier, vole à la défense de ses voisins, attaque le loup et se bat corps à corps. Tous les cinq sont horriblement blessés.
Demi-heure après, le loup, retourné sur ses pas, trouve sur la grand route de Pont-l’Abbé Barraud monté sur une mule et le suit. Bientôt la mule ronfle et s’agite et avertit son maître de la présence de l’animal. Barraud regarde derrière, voit le loup, fait tapage, s’agite, fait claquer son fouet. Le loup le suit également. La mule devient furieuse ; Barraud voit le moment où elle va le jeter par terre. Barraud fait tout ce qu’il peut pour faire peur au loup ; le monstre l’attaque, le combat est terrible, dure longtemps, Barraud tantôt terrasse le loup, tantôt en est terrassé ; le loup enfin terrasse Barraud, lui dévore la figure. Barraud de ses deux mains saisit les mâchoires, ouvre de force la gueule du loup et triomphe. L’animal gagne le large. L’infortuné Barraud nage dans son sang, ses vêtements restent en lambeaux sur le champ de bataille ; il regagne vers son hameau à pied, ses forces abandonnent, il remonte sur sa mule et gagne sa maison.
 Le lendemain dès le matin le loup s’est porté sur les communes de Sainte Geneviève, Nancras, Le Gua, où il a blessé plusieurs personnes, et a été tué sur le champ, commune de Saint Blanceaux.
 

 
Les fosses aux Loups  
(Henri. GELIN)


« On prend le loup dans des fosses dont l’ouverture est de neuf à dix pieds en carré et de pareille profondeur ; il est bon qu’elles soient plus larges dans le fond et de tous les côtés que par le haut, afin que le loup ne puisse pas sauter ni monter pour en sortir.

Il faut faire un carré de quatre pièces de bois de la grandeur de l’ouverture de la fosse (lettre A sur la figure) ; il serait même à propos de le poser en place sur la terre à l’endroit destiné, creuser la fosse en dedans, et enfoncer les pièces de bois dans la terre, de manière qu’elles soient à niveau du terrain. (...) 

Après cela, on fait le couvercle de planches minces qui remplissent l’ouverture du carré B B. Ce couvercle doit être partagé en deux parties égales, et on fait en sorte qu’il s’ouvre en dedans la fosse par le milieu. (...) Quelques-uns se servent, pour former le couvercle, de deux claies qu’ils accommodent juste, au lieu de planches, (...) puis ils y passent et fourrent au travers des vides, des herbes, des brins de fougère, du genêt ou de la bruyère, afin que cela paraisse comme le terrain même qui est autour ; et s’il n’y en avait point, on ne ferait pas mal d’en piquer et d’en répandre aux environs, pour que l’animal ne se méfie point.

Il faut que le couvercle B B se referme de lui-même ; pour cela, on attache à chaque côté du couvercle un contrepoids, comme il est marqué en la figure suivante C C, et à chaque contrepoids une petite ficelle E E, qu’on noue à un piquet F F, afin que le couvercle se referme, et que la ficelle le retienne, de peur qu’il n’ouvre trop et qu’il ne puisse pas se refermer de lui-même.

Quand tout cela est fait et mis en place, on chasse dans la terre tout autour et proche du carré, des piquets de bois (...) qui se joignent par le haut comme un toit de maison : on attache au haut des deux rangées de piquets une perche ou gaule qu’on lie fortement avec des barres, qui forme comme le faîte d’une charpente, et cela des quatre côtés ; ce qui compose une galerie tout autour de la fosse (voir le dessin de droite), où l’on met un mâtin (un chien de garde robuste et massif), qui est accoutumé à être toujours libre, et qui, en se promenant dans cette galerie, s’ennuie et hurle toute la nuit. Au lieu de chien, on y peut mettre un mouton, qui bêle toute la nuit : cela attire le loup, qui tourne en dehors de la galerie pour poursuivre l’animal qui est enfermé et qu’il espère prendre ; l’animal fuit en voyant le loup ; et celui-ci ennuyé de tourner toujours en dehors, saute par dessus la galerie de piquets, dans l’espérance de lui couper le chemin, et tombe dans la fosse.

Les piquets ont encore l’avantage d’empêcher que des hommes ou des bestiaux ne tombent dans la fosse. Il s’y prend quelquefois plusieurs loups en une nuit. » 

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