La colonie pénitentiaire agricole
de Tesson

Article d'André Lemoine, d’après le texte de Henri Bastard de Crisnay-Péré : La colonie pénitentiaire de Tesson, ou la « traite des petits blancs » [1] , avec la contribution de Nicole Gauthier, Yves Adenis-Lamarre, Martine Verger et Jean-Michel Dallet.

Au XIXe siècle en France, furent créées des colonies agricoles qui recueillaient des enfants orphelins, pauvres ou délinquants selon les cas. Ces établissements pouvaient être privés, subventionnés par des sociétés de bienfaisance ou encore gérés par l'État.

Les colonies qui recrutaient des enfants traduits en justice, généralement pour mendicité ou rapine, étaient en même temps des pénitentiaires, certains servant d’annexes aux maisons centrales.

Appartenant ou non à l’État, elles recevaient une allocation fixe, par jour et par tête. Elles avaient à charge de « procurer à ces enfants mis en état de liberté provisoire, l’éducation morale et religieuse, ainsi que l’instruction primaire et élémentaire, » et leur donnaient une formation professionnelle essentiellement agricole. L’État s’attachait ensuite à faciliter leur placement.

Les enfants internés dans ces colonies y subissaient un régime dur, et l'on relève parmi ceux-ci une mortalité importante. On peut se faire une petite idée de ce que fut la vie à Tesson, à travers quelques photos prises au début du XXe siècle à la colonie de Mettray, en Indre-et-Loire :

Le modèle de Mettray 


Vue générale de la colonie de Mettray, fondée en 1838. Par comparaison,
la colonie de Tesson fut de petite taille, avec une capacité de peut-être 150 pensionnaires,
et ne resta en activité que neuf ans.

Les pensionnaires suivaient un emploi du temps rigoureux :

« Le levé a lieu à cinq heure en été, et six heure en hiver ; habillement, ablution, prière et travaux jusqu’à huit heures ; une demi-heure pour le déjeuner et la récréation ; quatre heures de travail ; une heure pour le diner et la récréation ; en été, classe de deux heures pour la trop grande chaleur, puis travail de quatre heures ; en hiver au contraire, travail de quatre heures, puis classe de deux heures à la lumière ; une heure pour le souper, le chant du soir, la prière ; à neuf heures, le coucher. Les enfants reçoivent 750 grammes de pain par jour, du lard et du bœuf à un repas, deux fois par semaine. Le reste du temps de la soupe, des légumes, des fruits, du fromage, etc. Le clairon sonne le passage d’un exercice à un autre. C’est aussi au son du clairon que chaque section se rend à l’atelier ou au champ. » [2]

Groupe d'enfants pensionnaires à Mettray

Surveillant et colons

Salle de classe

Travaux dans la buanderie

Employés aux champs

L'atelier des sabotiers

La séance de gymnastique


Tesson

Dans les Deux-Sèvres, la première colonie de ce type ne fut construite qu’en 1873 sur le domaine de Tesson, commune de Prissé [3], jouxtant celle de La Foye-Monjault au sud. Sa fondation fut tout à la fois motivée par des sentiments humanitaires et des calculs commerciaux confinant à l’escroquerie.

Ainsi, le 24 novembre 1873, un certain TARRIDE-BÉLIN, propriétaire du domaine, obtient du ministre de l’intérieur l’autorisation de fonder sur ses terres une colonie pénitentiaire de jeunes délinquants.

Dans une lettre du 30 juillet 1876 adressée au préfet des Deux-Sèvres, l’inspecteur général de l’administration pénitentiaire dresse un portrait peu flatteur du fondateur : un homme qui ne voit dans la gestion de la colonie que spéculation d’argent, et le moyen de renflouer ses dettes grâce aux subventions de l’État (voir ci-dessous le rapport de l’inspecteur général).

C’est que les relations entre le sieur Tarride-Bélin et l’administration sont tendues. Demandes irrégulières et harcèlements d’un côté, refus et frustrations de l’autre, comme pour le nombre de pensionnaires : Tarride-Bélin exige 500 détenus, alors que la loi n’en autorise que 300. De même, d’un point de vue légal, la colonie doit être agricole. Mais elle est en partie industrielle, permettant de meilleurs rendements financiers aux dépends de l’éducation des enfants.

Autre motif de discorde, Tarride-Bélin demande à être nommé directeur de la colonie, ce que le règlement, en tant que fondateur, ne lui permet pas. Face au refus de l’État, il fait nommer l’un de ses hommes, Louis ROZÉ. [4]

En 1874, le règlement intérieur de la maison n’est toujours pas finalisé. Le 20 avril, il est rejeté par l’administration qui ne le trouve pas conforme, tant sur le plan de l’instruction morale et religieuse, que sur le plan professionnel : la loi exige que les enfants jouissent de la moitié du salaire payé pour leur travaux (chez des employeurs de la région, qui peuvent être des particuliers), mais Tarride-Bélin ne leur accorde que 20 centimes de l’heure.

En dépit de quoi l’affaire ne lui est pas suffisamment profitable, et, le 22 juin 1876, il est contraint de démissionner. Incapable de payer ses fournisseurs et créanciers, ceux-ci deviennent propriétaires du domaine par le biais d’une société fondée ce jour-là : « La Bienfaisance ».

Cependant, l’État craignant que cette acquisition ne constitue une nouvelle étape dans l’exploitation des enfants, on nomme un directeur avec une réputation d’intégrité : Pierre Frédéric Léopold MARCHESSEAU, ancien chef de bataillon du 3e régiment d’infanterie de marine, le fils de Frédéric Théodore, maire et notaire de La Foye, et l'arrière-petit-fils d'André VIEN, rédacteur du cahier de doléance de cette commune, et qui en fut lui aussi maire. Mais Marchesseau démissionne en avril 1879, après s’être plaint de ne pas avoir eu accès aux fonds de fonctionnement de la société.

L’État tente d’intervenir et accorde une subvention de 4 000 Frs, le 28 juin 1880. Malgré cela, en octobre de l’année suivante, les ressources sont épuisées et la société remet ses possessions à la disposition du gouvernement. Pour le compte de La Bienfaisance, ce sont MM. GOGUET, propriétaire à Gript, et PETIT-IZAMBERT, ancien négociant à Niort, qui signent la cession. L’État décide alors de fermer la colonie, ce qui sera fait en décembre 1882. Il ne subsiste aujourd’hui plus rien des bâtiments.

Rétrospectivement, la colonie de Tesson fut une calamité pour les villages alentours. Les délinquants, souvent condamnés pour des broutilles, n’en mettaient pas moins le voisinage au pillage. Il y eut de nombreuses évasions et même quelques crimes : le 6 avril 1875, le gardien LEMELLOIS fut attaqué et tué par des détenus en forêt de Chizé.

Cela n’empêchait pas certains colons d’être employés chez des particuliers. En septembre 1874, quinze enfants effectuent des travaux agricoles chez M. Benoit d’AZY, propriétaire du domaine de Labonne ; en juillet 75, ils sont vingt-cinq au domaine de Pommeroux. En septembre, ils sont employés aux vendanges par brigades de dix placées chacune sous la surveillance d’un gardien. Parmi leurs employeurs, des députés, des juges, l’intendant général FRIAND, ainsi que le maire du Grand-Prissé, Louis BASTARD, dont la propriété jouxtait les locaux de la colonie.

Les détenus gagnaient 1 F par jour de 14 à 16 ans, et  50 c pour les moins de 14 ans. Par comparaison, en 1881, un inspecteur gagnait 3 000 F par an, un greffier-comptable 2 600 F, un gardien-chef 1 800 F, un gardien 1 300 F, l’aumônier 800 F, et un stagiaire agricole 600 F.

Le personnel de la colonie comprenait un directeur, un sous-directeur, un gardien-chef, un comptable, un chef de culture, un chef-jardinier, un chef de forge, un chef-menuisier, un chef de ferme, un chef de musique, un chef-cordonnier et 14 gardiens, la plupart étrangers à la région.

Parmi eux Jacques LANTIER, né à Prahecq. En 1881, l’abbé RAMBAUD, curé de La Foye, devient aumônier de la colonie, remplaçant dans ce rôle l’abbé DELAVALLE, curé de Beauvoir, membre de la Commission de Surveillance. Aussi de Beauvoir, le docteur PELLEVOISIN avait cette année-là pour charge de soigner les pensionnaires.

Les recensements de 1876 et 1881 nous donnent les noms des employés de la colonie pour ces années-là. [7]


Les conditions de vie des enfants

Résumé du rapport de l'inspecteur général


Personnel

Le personnel des gardiens laisse beaucoup à désirer : l'insuffisance des traitements explique le mauvais traitement des gardiens, qui sont presque tous des individus ignorants, incapables et repoussés de partout. Sans parler du dénommé VALADE, condamné aux travaux forcés, et pour ne citer qu'un exemple, le sieur FIJOU, l'un d'eux, se livre sur les enfants à des brutalités qui lui ont valu, parmi les jeunes détenus, une notoriété redoutable. Ce gardien est détaché au domaine de Pommeroux, dont Mr Tarride-Bélin a cherché à cacher l'existence, parce qu'il craignait à juste titre qu'une visite dans cette propriété éloignée d'une quarantaine de kilomètres ne révéla une irrégularité et montra un groupe d'enfants sans discipline, sans enseignement primaire, sans éducation morale. Les soins de propreté du corps ne sont pas moins négligés.

Salubrité - Propreté

Ce qui frappe à première vue, dès l'entrée de l'établissement, c'est le manque d'ordre et de propreté. Les vêtements des jeunes détenus sont sales, usés ou déchirés. Les anciens bâtiments sont sordides. Les dépendances servant de cuisine, d'étables, de magasins, de cellules, et sont dans un état évident de ruine et de misère. Les soins de propreté

Régime alimentaire

La nourriture est très insuffisante et ne répond nullement aux exigences du règlement général : en fait de viande, les enfants ne consomment que des oreilles de porc. La soupe est immangeable et les principaux aliments sont invariablement des haricots rouges et des anchois. Pas de gobelet pour boire. Les enfants boivent, à tour de rôle, à un seau placé au milieu du réfectoire.

Malades

L'infirmerie offre un spectacle vraiment affligeant. Les tables ne sont pas parquetées. Il n'y a ni cheminée pour l'hiver, ni vase de nuit, ni descente de lit. Il y a au milieu de la salle un baquet commun qui exhale une odeur insupportable.

Vestiaire

il n'y a pas de de trousseau complet pour chaque enfant et les vêtements en usage sont dans le plus mauvais état. 

Instruction religieuse

L'instruction religieuse est presque nulle. Mr Tarride donnant toujours pour prétexte à l'aumônier, pour diminuer le nombre et la durée des leçons, que des travaux urgents retiennent les jeunes détenus. Les vingt enfants placés à Pommeroux ne reçoivent aucune instruction. L'instruction primaire est encore plus négligée que l'instruction religieuse.

Travail des enfants

Dans un esprit de lucre, Mr Tarride-Bélin fait travailler les jeunes détenus pendant douze heures et demie, contrairement au règlement. Beaucoup d'enfant pour lequel le directeur se fait payer par les particuliers un prix de journée de 1.50 frs, sont placés en dehors de toute surveillance. Il existe un atelier de brosserie non-autorisé par l'administration. Mr Tarride-Bélin n'accorde aucune rémunération aux enfants occupés, soit à des travaux industriels, soit aux travaux des champs. Toutes les sommes indument retenues devraient être restituées au pécule des enfants. L'inspecteur général fournit, ensuite, de longs détails qui confirment, en l'aggravant, les observations adressées à Mr le Préfet, le 24 avril dernier, sur les actes de brutalité, qui sont le moyen le plus ordinaire de répression, et sur les retenues irrégulières faites sous le prétexte d'amendes exorbitantes.


Origine géographique des détenus

D’où venaient ces enfants ? Tout comme le personnel, la plupart n’étaient pas de la région, comme en témoignent les décès relevés plus bas par Nicole. Quel forfait avaient-ils commis ?
  • Savin ARENESSE a été condamné à l’âge de 13 ans à une peine de cinq ans de détention pour mensonge et vagabondage : « se moquant du déshonneur ».
  • Charles RICHET, 15 ans, mousse déserteur, à cinq ans pour s’être livré à la mendicité.
  • Marcel SABOURIN, 13 ans, à cinq ans pour avoir volé, de nuit, deux sacs de noix à M. de LAUZON, habitant Marigny (mère décédée et abandonné par son père).
  • Joseph VERGNAUD, 11 ans seulement, condamné à quinze ans pour cambriolages.


Évasions

Vu les conditions de détention, il y eut de nombreuses tentatives d'évasion. La plupart du temps, les enfants n'allaient pas très loin avant d'être repris par la gendarmerie.

Tesson informe la préfecture de l'évasion des quatre détenus,
et demande au préfet d'avertir les autorités des départements voisins.
Télégramme daté du 23 mars 1876.

En mars 1876, quatre détenus parvenaient à s'enfuir en direction de Saintes :
  • Jean Émile PAROUTAUD [8], 18 ans, fils de Pierre et Marie ROUSSEAU, né en 1857 à Limoges, Haute-Vienne ;
  • Théophile Eugène GUÉROULT, 17 ans, fils de père inconnu et de Marie Désirée GUÉROULT ;
  • Baptiste GÉRARD, 16 ans, fils de père inconnu et de Marie GÉRARD, né en 1859 à Brives, Corrèze ;
  • Jules Henri Marie PROVOT, 16 ans, fils de Jean Félix et de Sophie Angélique ADAM, né à Nantes, Loire Inférieure.
Arrivés à Saint-Georges-des-Coteaux, à l'ouest de la ville, Guéroult et Gérard entrèrent par effraction dans la maison d'un dénommé MACHEFERT, à qui ils vont « frauduleusement soustraire des vêtements, et une certaine quantité de vin et d'eau de vie », pendant que les deux autres faisaient le gué.

Trois jours plus tard, un autre télégramme
fait état de leur arrestation.

La police les arrêta peu après. Inculpés de vol, le tribunal de Saintes les condamna à payer une amende en dédommagement du sieur Machefert, ainsi qu'une somme couvrant les frais de justice. Tous furent condamnés à un an de prison supplémentaire.

En avril 1880, le jeune Amédée GAUTHIER, 17 ans, né à Périgné en Dordogne, s'évadait à son tour. Il était lui aussi repris quelques jours plus tard, sur la route nationale par la gendarmerie de la Tricherie (commune située au nord-est de la colonie, à mi-chemin entre Châtellerault et Poitiers).

Extrait du Journal de la Vienne, des Deux-Sèvres et Vendée,
avril 1880 [source : Jean-Michel DALLET, Wiki Niort]



Réhabilitation d'un jeune détenu

En septembre 1879, un article rendait compte de deux actes remarquables, qui vaudrait à son auteur une demande de grâce déposée au ministère par l'inspecteur général BADIOT DE LA TRONCHÈRE.

En effet en mai de la même année, Joseph BELLANGER, jeune détenu, rapportait à Louis MORIN de Coulon, une valise que ce dernier avait perdu sur la route. Elle contenait 500 Frs, somme considérable pour l'époque. Et encore le 6 septembre alors qu'il travaillait chez M. PAILLER, maître d'hôtel à Beauvoir, il trouva dans un vase la somme de 167 Frs qu'il porta aussitôt à son propriétaire. 

On ignore ce qui avait amené Joseph à Tesson, mais avec un peu de chance sa conduite lui aura permis d'écourter son séjour.

[source : Jean-Michel DALLET, Wiki Niort]



Liste d'enfants décédés à la colonie

Nicole Gauthier, qui partage souvent avec moi le fruit de ses recherches généalogiques, m'a permis de compléter cet article en me communiquant la liste qui suit. Elle m'écrivait à ce sujet :

« Le logis de Tesson était à l’origine un prieuré construit au XIe siècle par les moines de l’abbaye bénédictine de Saint-Maixent [5]Au XIXe siècle lorsque furent créés, sous le nom de colonies agricoles, des colonies pénitentiaires qui furent en réalité de véritables bagnes pour enfants. Le logis de Tesson en abrita une qui fonctionna de 1873 à 1882. Les plus connues de ces colonies agricoles et pénitentiaires sont celles de Mettray (1839-1937) et de Belle-Ile-en-Mer (1880-1977). Celle de Tesson est moins, voire peu connue.

C’est au cours de recherches généalogiques que j’ai découvert ce bagne en dépouillant les registres des actes de décès de ce qui était alors la commune du Grand-Prissé. Et ce présent travail est le souhait que ne tombent pas dans l’oubli les noms de ces jeunes enfants perdus. Cette découverte fut pour moi une des plus émouvantes que j’ai faite.

Les déclarations de décès s’arrêtent à la date du 23 février 1877 alors même que cette colonie fonctionna au-delà de cette date. Se pose alors la question de savoir où furent déclarés les décès des autres enfants qui y furent enfermés, car il me paraît déraisonnable de penser qu’il n’y en eut plus. »

Voici le nom de quelques enfants qui moururent à Tesson : [6] et [6b]
  • François RAYO, âgé de 11 ans, né à Naples, fils de Pierre Michel RAYO et de Marie ARONASA, décédé le 18 février 1876.
  • Paul MOREAU âgé de 17 ans, né aux Mathes (Charente Maritime), fils de Louis MOREAU et d’Adélaïde COUNIL, décédé le 19 février 1876.
  • Gabriel RÉPIN, âgé de 13 ans, né à Jarnac (Charente), fils de Louis RÉPIN et de Marie GALLAIS, décédé le 29 février 1876.
  • Louis CARRÉ, âgé de 14 ans, né à Chissay (Loir-et-Cher), fils de Sylvain CARRÉ et de Marie DAUBRON, décédé le 19 mars 1876.
  • Lucien Louis FEDORET, âgé de 11 ans, né à Montoire (Loir-et-Cher), fils de feu Lucien FERODET et de Marie GUILLIER, décédé le 22 mars 1876.
  • Jules Désié BIOT, âgé de 16 ans, né à Toutainville (Eure), fils de Jean Arsène BIOT et de Aimée Justine BERTOIS, décédé le 28 mars 1876.
  • Charles Alfred Ernest ROUVROY, âgé de 14 ans, né à Fresnes (Somme), fils de Frédéric ROUVRAY et d’Eliacime SUART, décédé le 1er avril 1876.
  • Pierre Félix MASSÉ, âgé de 11 ans, né à Bordeaux (Gironde), fils de père inconnu et de Clara MASSILLON, décédé le 3 avril 1876.
  • Louis Auguste GIFFARD, âgé de 18 ans, né à Gournay (Seine Maritime), fils de père inconnu et de Prédestine Aimée GIFFARD, décédé le 23 avril 1876.
  • Constant Nicolas Joseph POUILLADE, âgé de 12 ans, né à Bertincourt (Pas-de-Calais), fils de Constant Joseph POUILLADE et de Marie Catherine Josèphe TABARY, décédé le 16 mai 1876.
  • Louis Victor ROUTIAU, âgé de 14 ans, né à Voultegon (Deux-Sèvres), fils d’Isidore Routiau et de Marie Niaut, décédé le 17 mai 1876.
  • Alexis Charles LECONTE, âgé de 11 ans, né à Paris, fils de Louis Emile Eugène LECONTE et d’Augustine Julie METHÉE, décédé le 27 mai 1876.
  • Jean dit Marcelin DUFOSSÉ, âgé de 12 ans, né à Pérignac (Gironde), fils de père inconnu et de Françoise DUFOSSÉ, décédé le 9 juin 1876.
  • Germain ABOULY, âgé de 15 ans, né à Paris, fils de Guillaume ABOULY et de défunte Marie MALY, décédé le 13 juin 1876.
  • Arsène BRUNG, âgé de 13 ans, né à Biron (Charente Maritime), fils de Jean BRUNG et de défunte Marie BRUNG, décédé le 19 juillet 1876.
  • Charles Alexandre BAILLY, âgé de 13 ans, né à Sorel (Somme), fils de Charles François BAILLY et de Marie Hortense FLOMION, décédé le 4 août 1876.
  • Henri BELLY, âgé de 12 ans, né à Foussignac (Charente), fils de Joseph BELLY et de Marie GUILLÉ, décédé le 29 août 1876.
  • Edouard, âgé de 10 ans, né à Château-Bernard (Charente), fils de père inconnu et de Jeanne RUTELLIER, décédé le 29 août 1876.
  • Louis Alexandre FOUBERT, âgé de 15 ans, né à Evreux (Eure), fils de Louis Alexandre FOUBERT et de Marie Julie Ernestine QUESNEL, décédé le 24 septembre 1876.
  • Léon Joseph DERAËSE, âgé de 12 ans, né à Sequedin (Nord), fils de Pierre DERAËSE et de Justine CHOIRA, décédé le 20 octobre 1876.
  • Louis Benoit VILLETTE, âgé de 13 ans, né le 7 novembre 1863 à Verton (Pas-de-Calais), fils d’Auguste VILLETTE et de Florine LELEU, décédé le 1er janvier 1877.
  • Hermel Désiré Marie BRANGEON, âgé de 15 ans, né à Champtoceaux (Maine-et-Loire), fils de Julien BRANGEON et de Madeleine MARY, décédé le 23 février 1877.

Récemment, Yves Adenis-Lamarre, auteur d'importantes recherches généalogiques dans la région niortaise, parvenait à identifier le fameux « Tarride-Bélin » : Il s'agit en fait d'Adolphe TARRIDE, négociant originaire de Haute-Garonne, époux de la niortaise Adeline BELIN.

Yves remarque que le décès son épouse à Tesson, âgée de seulement 36 ans, précède tout juste celui des enfants. Fut-elle la première victime d'une épidémie qui aurait sévie jusqu'au début de l'année suivante ? On ne peut pas l'exclure, d'autant qu'une autre adulte y décède également en mai 1877 : une couturière du nom de Louise HUBERT, épouse d'Édouard COUTY, l'un des gardiens de la colonie. 

Docteur à la retraite, Yves y voit une épidémie de staphylocoque ou streptocoque plutôt qu'une tuberculose (trop de cas en trop peu de temps). La fin de l'épidémie expliquerait l'absence de décès par la suite.

Adolphe TARRIDE et Adeline BELIN eurent deux filles nées à Niort en 1862 et 65, Artémise et Marthe, dont on ne sait pas ce qu'elles sont devenues, le père ayant sans doute déménagé suite à cette mauvaise affaire.

Notons au passage que Jean Bertrand TARRIDE, le frère d'Adolphe, eut pour fils Abel Anatole (1865-1951) qui fut acteur de cinéma. Ce dernier eut à son tour deux fils, Jean Abel (1901-1980) acteur et réalisateur, et Jacques, également acteur (cf. wikipedia).


Bibliographie



À noter la parution du livre Au Bagne des Enfants, de Sarah Blaineau. Dans ce roman, nous accompagnons dans ses épreuves Émile, l'un des jeunes détenus incarcérés à Tesson pour vol. 


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Notes
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[1] Bulletin de la Société Historique et Scientifique des Deux-Sèvres, 2e série, Tome XIII, 1980, n˚1.   [<-]

[2] Grand Dictionnaire Universel Larousse. s. v. Mettray. 

En ligne, l'histoire de la colonie de Belle-Ile-en-Mer publié par Jean Claude Vimont sur Criminocorpus, rapporte notamment les brimades qu'y subissaient les enfants, et qui conduisirent à une révolte, ainsi qu'à l'évasion de 56 d'entre eux. En voici un extrait : 

« L’évènement marquant de l’histoire de la colonie Belle-Île est l’évasion massive de cinquante-six pupilles en 1934, que d’aucuns retiennent sous le nom de la « Chasse à l’enfant », en référence au titre du poème écrit par Jacques Prévert, ou encore « scandale des bagnes d’enfants ». Jacques Bourquin résume ainsi cet épisode : « Depuis plusieurs mois, le climat est médiocre à l’intérieur de l’institution. Un soir d’août 1934 éclate un incident au réfectoire, un incident apparemment bénin. Contrairement au règlement, un colon a mangé son fromage sans avoir bu sa soupe. Il est puni [et passé à tabac], ses camarades du réfectoire se solidarisent avec lui, c’est le début d’une révolte que les personnels n’arrivent pas à contenir. Les pupilles franchissent les murs de la colonie, se répandent dans toute l’île où se trouvent, en cette période, beaucoup de vacanciers ». Une « battue » est organisée afin de retrouver les enfants. Les habitants de Belle-Île et les touristes sont mis à contribution, et pour les motiver, une récompense de vingt francs par enfant trouvé leur est promise, certains gagneront même jusqu’à deux cents francs. Cette forte mobilisation a permis de retrouver tous les enfants, qui ont reçu une sévère correction. Une campagne de presse qui durera trois ans est alors menée par Alexis Danan, grand reporter pour le journal Paris-Soir, afin de dénoncer les pratiques de ces « bagnes » pour enfants et de sensibiliser l’opinion publique. Il lance des appels à témoignages et met en cause d’autres colonies telles que celle de Mettray, en Indre-et-Loire. »    [<-]

[3] Aujourd’hui commune de Prissé-la-Charrière, le domaine de Tesson, qui était en 1980 la propriété de la famille Giraud-Margat, constituait à la fin de l’ancien régime une seigneurie appartenant au chevalier de La Perrière, seigneur de Thorigny, ancien mousquetaire et lieutenant des maréchaux de France. Ces titres ne l’empêchèrent pas d’acquérir de la nation, le 2 mars 1791, le prieuré de La Foye et les huit métairies attenantes qui en dépendaient. Il perdrait par la suite tous ces biens, y compris le domaine de Tesson, pour avoir émigré.   [<-]

[4] Un rapport de police indique que Louis Rozé, fleuriste, et sa femme, piqueuse de bottines, s’étaient compromis pendant la Commune, ce qui était très mal vu de l’État à cette époque. Louis est cité avec son épouse dans le recensement de 1876 donné plus bas (voir [7]).   [<-]

[5] Les Bénédictins fondèrent le prieuré de La Foye à la même époque que celui de Tesson. D'après Châteaux, manoirs et logis des Deux-Sèvres (éditions Patrimoine Média) : « Le prieuré de Tesson, construit au XIe siècle par les moines de l’abbaye bénédictines de Saint-Maixent, était également une seigneurie et recevait dîmes et droits seigneuriaux. Il dépendait de Thorigny, appartenant aux comtes du Poitou. En vente au XVIe siècle, Tesson fut acquis par Hugues de Fouchier. Il échut ensuite à Catherine des Francs, René de Castello, puis à Pierre, son fils, et à François son petit-fils, mort sans postérité. Tesson passe aux la Perrière jusqu’en 1792, date à laquelle Henri-Charles émigra. Au XIXe siècle, furent créées sous le nom de colonies agricoles, des colonies pénitentiaires. Fin 1873, une de ces colonies fut créée à Tesson, qui fonctionna jusqu’en 1882. »   [<-]

[6] Nicole Gauthier   [<-]

[6b] À noter sur Geneanet le site de la colonie pénitencière pour enfants de Montlobre, à Vailhauquès (Hérault), tenu par Henry FRIOL.

[7] Recensement de 1876 et 1881, archives numériques des Deux-Sèvres.

1876 :
  • Louis Alphonse Nicolas ROZÉ, greffier natif du département de la Seine, domicilié à la colonie avec son épouse Marie Gabrielle FRUTON, 55 ans, native de l'Isère.
  • Édouard François PERUIEN, fonction ? 53 ans, natif de Charente Maritime.
  • Pierre Jean BARON, surveillant, 53 ans, natif de Charente Maritime, logé avec Émilie Clémence MARCHAND, 30 ans, sa servante, native des Deux-Sèvres.
  • Henri Pierre PACAUD, gardien, 31 ans, natif de Saint-Sauveur-de-Noaillé en Charente Maritime, accompagné de sa femme, Ézilda GIRAUDEAU, 25 ans, native de Thorigny, Deux-Sèvres, et de François et Adeline PACAUD, leurs enfants.
  • Léon Louis Marie LE FLOCH, 22 ans, surveillant, natif du Morbihan.
  • Jean Jacques Sylvestre DAUNIS, 48 ans, surveillant, avec sa femme Amanda Rosalie FOURNIER, 38 ans, et ses deux fils, Jules Adrien Gaston, 18 ans, employé à la colonie, et Eugène Hyacinthe, 15 ans, surveillant.
  • Louis Pierre MILLET, surveillant de 26 ans, natif des Deux-Sèvres.
  • René Philippe CORSET, surveillant de 39 ans, natif des Deux-Sèvres, avec sa femme Éléonore SABOUREAU, couturière de 31 ans, native des Deux-Sèvres.
  • Auguste BAILLET, gardien cultivateur, 35 ans, natif de Salle, Charente-Maritime.
  • Édouard COUTY, gardien, 41 ans, natif de Poitiers dans la Vienne, et sa femme Louise HUBERT, couturière, 55 ans, native de Chenu dans la Sarthe.
  • Jacques Marie GUINCHARD, surveillant, 28 ans, natif des Côtes-du-Nord.
  • Julien BERTHOMÉ, maître cordonnier, 38 ans, accompagné de sa femme Célestine ROLAND, lingère, 29 ans, gardienne de leur neveu Gaston BETIN, deux ans.
  • Paul Émile BONNET, surveillant, 41 ans, natif de Niort, et sa femme Octavie LHERMINIER, 32 ans, native de Meurthe-et-Moselle, et Louis Jules Paul Émile BONNET, deux mois, né au Grand-Prissé.
  • Louis MÉTAYER, domestique, 50 ans, natif de Coulon, Deux-Sèvres, et sa femme Madeleine PILLARD, servante, 42 ans, native des Deux-Sèvres.
  • Simon JAY, gardien, 22 ans, natif de la Loire.
  • René BOUIN, sabotier, 38 ans, natif de Niort, et sa femme Marie Louise POMMIER, couturière, 30 ans, native des Deux-Sèvres, et leurs enfants Raoul et Émile BOUIN.
1881:
  • Directeur : François JEANNEAU, 45 ans
  • Sous-directeur : Alexandre CAMUS, 26 ans
  • Institutrice : Valentine RAVARD, 30 ans
  • Instituteur : Célestin FOUQUAUD, 25 ans
  • Forgeron : Arthur LAURENTIN, 38 ans
  • Cordonnier : Alphonse PLISSON, 41 ans
  • Jardinier : Auguste DALIDET, 42 ans
  • Gardien chef : Antoine BIGNOLES, 55 ans
  • + 7 gardiens : Hippolyte ROULLEAU, 51 ans, Alfred MAXIMIN, 31 ans, Jacques DAVID, 55 ans, Henri CAHORS, 44 ans, Jean Marie LOUMAGNE, 43 ans, Éléonor GRANIER, 29 ans, Charles ROUSSEAU, 29 ans.
   [<-]

[8] Jean Émile Paroutaud est l'arrière-grand-père de Martine Verger, qui nous a communiqué ses informations.   [<-]
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3 commentaires:

Unknown a dit…

Avril 1880, Amédée Gauthier 17 ans, évadé et repris, exemple relevé sur la presse (envoi sur demande).

André Lemoine a dit…

Bonjour,

Merci pour ce complément. Si vous pouviez m'envoyer un scan de la coupure de presse, je pourrais l'ajouter au texte.

Bien cordialement,

André

Unknown a dit…

OK
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